Mur d'honneur de Sobey
Colonne
165
Rangée
21
Frederick Thomas Davis était l’un de 85 000 enfants migrants qui sont venus au Canada de la Grande-Bretagne à la fin du 19e et au début du 20e siècle. Son histoire est triste, mais typique d’une époque où la pauvreté familiale et la pauvreté infantile, de même que l’absence de tout filet de sécurité sociale, faisaient en sorte qu’il était socialement acceptable d’envoyer ses enfants à d’autres pays de l’empire pour qu’ils cherchent une nouvelle vie.
Fred Davis a été accueilli dans la demeure du Dr Barnardo le 1er juillet 1902 avec son frère, Albert. Avec son frère, il avait été découvert errant dans la rue de l’est de Londres par la police, qui a tout de suite communiqué avec la National Society for the Prevention of Cruelty to Children (la Société nationale pour la prévention de la cruauté envers les enfants ou NSPCC). La NSPCC est intervenue auprès de leur père, Samuel Davis, un porteur de charbon, pour négligence. Les registres du Dr Barnardo décriront ensuite Samuel comme un homme « très paresseux », « saoul », et un « bon à rien » qui n’avait « pas travaillé depuis plusieurs mois », sans domicile fixe et habitant dans des maisons de pension. Il a été mis en détention provisoire d’un mois, et la NSPCC a envoyé une demande au Dr Barnardo au nom des enfants. Samuel a consenti à leur admission, et les garçons sont allés vivre dans deux maisons séparées du Dr Barnardo dans l’est de Londres, près de Stepney Causeway, presque en face de l’Église de la mission méthodiste. Fred est allé à la maison Shepherd, et Albert à la maison Leopold.
Fred est né le 24 février 1893 à Ponders End, à Enfield, dans le nord de Londres. On sait très peu de son enfance, mais selon le recensement de 1901, en date du 31 mars, la famille vivait au 47 High Street, dans l’est de Londres, ce qui semble signaler un déclin de la situation familiale. À l’époque, la famille comptait aussi ses sœurs Ellen et Ethel, qui travaillaient toutes deux à l’usine d’allumettes Bell sur Bell Road, à Bromley-by-Bow, et la mère de Fred, Florence Mary Davis, née Downes, est morte de la tuberculose 4 mois plus tard le 31 juillet 1901, ce qui a sans doute affecté les circonstances de Samuel.
Ce décès semble en effet avoir précipité le déclin et le fractionnement de la famille, de sorte qu’un an plus tard, lorsque Fred et Albert ont été acceptés dans les maisons Barnardo, les sœurs vivaient séparément sur Washington Street.
Fred et Albert ont tous deux navigué vers le Canada le 25 septembre 1902 à bord du S.S. Colonian, arrivant le 6 octobre 1902 à Portland, dans le Maine. Le bateau transportait 169 garçons et 133 filles. Juste avant leur départ, leur père a écrit à Barnardo, demandant de les récupérer et s’opposant à leur expédition outremer, mais son consentement lors de leur admission dans les maisons de Barnardo incluait une permission spéciale qui autorisait leur émigration vers le Canada.
Ils ont voyagé par la terre vers Willetsholme, près de Kingston en Ontario, et se sont installés dans des fermes, comme c’était souvent le cas à l’époque. Dès janvier 1903, ils étaient tous deux dans leurs nouvelles maisons d’accueil, et ont même été présentés dans le magazine régulier de Barnardo, Ups and Downs :
Les frères, Albert et Freddie Davis, sont près l’un de l’autre dans le canton de Pittsburgh [Ontario]. Le petit Freddie est manifestement très aimé dans sa nouvelle demeure, alors qu’Albert satisfait à toutes les attentes, aux soins de gentils chrétiens.
Fred a vécu une vie variée et itinérante pendant ses premières années au Canada, habitant dans plusieurs fermes différentes, toutes dans la même région de l’est de l’Ontario. Il a aussi travaillé dans une usine de fromage près de Kingston, en Ontario, et dans un bar à Watertown, dans l’état de New York. Il s’est finalement installé pour de bon lorsqu’il a épousé Jessie Priscilla Ferris en 1912, et qu’il a commencé à travailler pour Grand Trunk Railway à Brockville vers 1913. Il est resté en contact avec Barnardo, dont la base canadienne était à Toronto, et a contribué à leur requête de Noël pendant plusieurs années. Après une longue carrière dans les chemins de fer, il est décédé à Brockville en mai 1957.