Mur d'honneur de Sobey
Colonne
165
Rangée
20
Albert Joseph Samuel Davis était l’un de 85 000 enfants migrants qui sont venus au Canada de la Grande-Bretagne à la fin du 19e et au début du 20e siècle. Son histoire est triste, mais typique d’une époque où la pauvreté familiale et la pauvreté infantile, de même que l’absence de tout filet de sécurité sociale, faisaient en sorte qu’il était socialement acceptable d’envoyer ses enfants à d’autres pays de l’empire pour qu’ils cherchent une nouvelle vie.
Albert Davis a été accueilli dans la demeure du Dr Barnardo le 1er juillet 1902 avec son frère, Fred Davis. Avec son frère, il avait été découvert errant dans la rue de l’est de Londres par la police, qui a tout de suite communiqué avec la National Society for the Prevention of Cruelty to Children (la Société nationale pour la prévention de la cruauté envers les enfants ou NSPCC). La NSPCC est intervenue auprès de leur père, Samuel Davis, un porteur de charbon, pour négligence. Les registres du Dr Barnardo décriront ensuite Samuel comme un homme « très paresseux », « saoul », et un « bon à rien » qui n’avait « pas travaillé depuis plusieurs mois », sans domicile fixe et habitant dans des maisons de pension. Il a été mis en détention provisoire d’un mois, et la NSPCC a envoyé une demande au Dr Barnardo au nom des enfants. Samuel a consenti à leur admission, et les garçons sont allés vivre dans deux maisons séparées du Dr Barnardo dans l’est de Londres, près de Stepney Causeway, presque en face de l’Église de la mission méthodiste. Albert est allé à la maison Leopold, et Fred à la maison Shepherd.
Albert est né le 10 mars 1890 à Ponders End, à Enfield, dans le nord de Londres. On sait très peu de son enfance, mais selon le recensement de 1901, en date du 31 mars, la famille vivait au 47 High Street, dans l’est de Londres, ce qui semble signaler un déclin de la situation familiale. À l’époque, la famille comptait aussi ses sœurs Ellen et Ethel, qui travaillaient toutes deux à l’usine d’allumettes Bell sur Bell Road, à Bromley-by-Bow, et la mère d’Albert, Florence Mary Davis, née Downes, est morte de la tuberculose 4 mois plus tard le 31 juillet 1901, ce qui a sans doute affecté les circonstances de Samuel.
Ce décès semble en effet avoir précipité le déclin et le fractionnement de la famille, de sorte qu’un an plus tard, lorsque Fred et Albert ont été acceptés dans les maisons Barnardo, les sœurs vivaient séparément sur Washington Street.
Albert et Fred ont tous deux navigué vers le Canada le 25 septembre 1902 à bord du S.S. Colonian, arrivant le 6 octobre 1902 à Portland, dans le Maine. Le bateau transportait 169 garçons et 133 filles. Juste avant leur départ, leur père a écrit à Barnardo, demandant de les récupérer et s’opposant à leur expédition outremer, mais son consentement lors de leur admission dans les maisons de Barnardo incluait une permission spéciale qui autorisait leur émigration vers le Canada.
Ils ont voyagé par la terre vers Willetsholme, près de Kingston en Ontario, et se sont installés dans des fermes, comme c’était souvent le cas à l’époque. Dès janvier 1903, ils étaient tous deux dans leurs nouvelles maisons d’accueil, et ont même été présentés dans le magazine régulier de Barnardo, Ups and Downs :
Les frères, Albert et Freddie Davis, sont près l’un de l’autre dans le canton de Pittsburgh [Ontario]. Le petit Freddie est manifestement très aimé dans sa nouvelle demeure, alors qu’Albert satisfait à toutes les attentes, aux soins de gentils chrétiens.
Albert a eu une vie variée et itinérante pendant ses premières années au Canada, vivant dans plusieurs fermes différentes, toutes dans la même région de l’est de l’Ontario. Cependant, l’impression, selon ce qu’on sait, est qu’il ne s’est jamais réellement installé comme son frère Fred l’a fait. Par exemple, il s’est enrôlé dans l’Armée canadienne en mars 1916, quittant ,Halifax pour Liverpool à la fin d’octobre 1916, bien qu’il existe une mention de service militaire préalable. Il a servi en France et est revenu de Liverpool à Halifax en avril 1919. Après son retour, il est apparemment retourné au secteur de l’agriculture et du transport à Gananoque, en Ontario. Il n’y a pas de preuve qu’il est resté en contact avec Barnardo, à l’instar de son frère Fred, mais les frères sont restés en contact. Il est décédé environ 10 mois avant Fred, en juillet 1956.