par Steve Schwinghamer, Historien
(Mise à jour le 21 décembre 2023)
L’exclusion antisémite et les politiques d’immigration du Canada
Depuis la création de la structure fédérale d’immigration du Canada lors de la Confédération jusqu’aux programmes massifs de réinstallation après la Seconde Guerre mondiale, la politique et les pratiques canadiennes en matière d’immigration ont été animées par un antisémitisme personnel et institutionnel. Malgré une certaine coopération réussie entre les organisations communautaires et les autorités d’immigration pour admettre et installer les immigrants juifs au Canada, les attitudes et les pratiques d’exclusion ont prévalu dans les bureaux d’immigration de la Confédération jusqu’après la Seconde Guerre mondiale. Dans cette longue histoire, le navire de réfugiés juifs MS Saint Louis, dont l’entrée a été refusée en 1939, sert souvent de repère pour la commémoration et l’exploration de l’exclusion antisémite au Canada. Les origines et la mise en œuvre de ce refus confirment la description faite dans les excuses officielles du gouvernement en 2018 pour avoir refusé l’asile aux passagers du Saint Louis :
« L’histoire du Saint Louis et de ses passagers n’est pas un incident isolé. Le gouvernement du Canada était indifférent face aux souffrances des Juifs bien avant que le Saint Louis mette les voiles sur le port d’Halifax et, malheureusement, bien après qu’il soit retourné en Europe... Ces réfugiés auraient fait de ce pays un pays plus fort, et la fierté de ses citoyens. Mais le gouvernement a tout mis en œuvre pour que leurs demandes n’aillent nulle part. »[1]
Les exclusions antisémites du Canada remontent aux fondations de la Nouvelle-France, une colonie destinée à l’origine aux catholiques seulement.[2] Dans ce contexte, l’historien Richard Menkis a identifié un cas en Nouvelle-France d’une femme juive renvoyée dans les années 1730 pour son acceptation variable de l’instruction catholique.[3] En Amérique du Nord britannique, on trouve également des expressions d’antisémitisme, y compris le refus du droit des Juifs à posséder des terres à la fin du XVIIIe siècle.[4] L’interdiction faite aux Juifs de posséder des terres était un mode de discrimination courant dans certaines parties de l’Europe et a également contribué à créer puis à renforcer l’hypothèse selon laquelle les immigrants juifs ne seraient pas des agriculteurs expérimentés ou susceptibles de réussir dans l’agriculture. Ce préjugé est devenu par la suite un obstacle sérieux à l’entrée des Juifs au Canada, car la politique d’immigration initiale mettait fortement l’accent sur les compétences agricoles.[5] Cette restriction s’applique aussi directement aux droits politiques, car la propriété est souvent un critère d’admission au droit de vote.
Immigration juive à grande échelle au Canada
La discrimination antisémite au Canada s’est intensifiée en réponse à l’important mouvement de Juifs d’Europe de l’Est et de Russie au tournant du vingtième siècle. Après des débuts modestes à la fin du XIXe siècle, environ cinquante mille Juifs sont arrivés au Canada entre 1901 et 1914, notamment en provenance de Russie et d’Europe de l’Est.[6] La communauté juive de Russie, en particulier dans la Zone de résidence, a vécu avec plus d’un millier de règlements et de restrictions visant et limitant spécifiquement sa communauté.[7] Après l’assassinat du tsar en 1881, les Juifs ont été victimes de persécutions et de pogroms pendant plus d’un an. Tout cela s’ajoutait aux effets généraux des épidémies, de la faim, de la pression foncière et de la pauvreté qui caractérisaient la région à la fin du XIXe siècle. L’émigration, puis l’émigration en chaîne, ont permis d’éviter ces problèmes.[8]
Le mouvement des Juifs vers le Canada à la fin du XIXe siècle a eu des partisans initiaux puissants, qui ont notamment reçu le soutien de Sir Alexander Galt (alors haut-commissaire canadien à Londres) et de Sir John A. MacDonald (premier ministre du Canada). Par la suite, une trentaine de communautés agricoles juives ont été créées dans l’Ouest canadien au tournant du XXe siècle.[9] De nombreux immigrants juifs se sont également installés dans l’Ouest et se sont lancés dans les affaires. Comme le note l’historien Gerald Friesen, ils se sont installés « dans les petites villes de la région agricole où le magasin général juif ― car à une époque, il y en avait plus de 100 au Manitoba ― était aussi courant que le café chinois. »[10] Cependant, les réactions des fonctionnaires canadiens de l’immigration face au nombre croissant d’immigrants juifs montrent que même traverser l’Atlantique n’a pas permis d’échapper à la discrimination antisémite. Par exemple, dans les années 1890 et au début des années 1900, alors que ce mouvement en provenance d’Europe de l’Est et de Russie prenait de l’ampleur, les fonctionnaires d’Halifax restaient d’avis que les Juifs des classes inférieures ne devaient pas être autorisés à débarquer au Canada et que les Juifs pauvres laissaient les quartiers d’immigration infestés d’insectes nuisibles.[11] Cette attitude reflétait une hostilité plus large et naissante à l’égard des immigrants d’Europe de l’Est, notamment de la part de Frank Oliver (rédacteur en chef de l’Edmonton Bulletin; plus tard ministre de l’Immigration au Canada), qui fit remarquer à propos d’une secte pacifiste russe qui arrivait que leur admission « pouvait être motivée par le christianisme, la philanthropie, la charité ou toute autre vertu, mais certainement pas l’immigration. »[12] Après leur arrivée, ces immigrants juifs d’Europe de l’Est dans les Prairies ont trouvé la solidarité dans leurs communautés de foi, mais l’isolement et l’exclusion dans les structures britanniques et chrétiennes qui les entouraient.[13] En général, les communautés agricoles juives n’ont pas duré longtemps et ne s’en sont pas bien tirées. Bien souvent, elles étaient à peine établies lorsque les conditions économiques et environnementales sont devenues pratiquement impossibles pendant la Grande Dépression.[14]
Les défis rencontrés par ces premières communautés, ainsi que les préjugés existants sur les immigrants juifs en tant que citadins, ont directement conduit les principales organisations juives du Canada à s’engager spécifiquement en faveur de l’installation des juifs dans les zones rurales et les fermes. L’historien John C. Lehr note que le Congrès juif canadien (CJC) a inclus dans sa mission initiale « la promotion de l’agriculture juive au Canada » et que la Jewish Immigrant Aid Society (JIAS) a également entrepris de promouvoir les « activités agricoles ».[15] La JIAS a été fondée en 1919; le CJC, lui, s’est constitué la même année, mais n’a pas fonctionné de manière régulière avant le milieu des années 1930.[16] Les lancements ont été réactifs : au lendemain de la Première Guerre mondiale, le gouvernement fédéral a mis en œuvre d’importantes restrictions visant les communautés considérées comme indésirables.[17] Les agents d’immigration se sont notamment tournés vers des outils familiers pour exclure les immigrants non désirés, par exemple les clauses sur le voyage continu, l’argent et les exigences en matière de passeport. L’historien Gerald Tulchinsky souligne l’obstacle que pouvait représenter chacune de ces mesures pour une personne qui avait fui son pays d’origine afin de trouver refuge ailleurs, par exemple les Juifs d’Europe de l’Est qui, à l’époque, étaient à nouveau la cible d’une violence particulière.[18] Un certain nombre de dirigeants juifs canadiens influents ont pu obtenir des exemptions de certaines restrictions pour les réfugiés juifs, mais même en cas de succès, cela a mis en évidence qu’il fallait disposer de relations organisées et durables avec les agents d’immigration pour faire face au nouvel environnement d’immigration.[19] L’augmentation des restrictions et la structuration systématique des vérifications ont été accompagnées par une augmentation des refus et par des expulsions : en 1920, le taux de refus et d’expulsion est deux fois plus élevé qu’en 1913.[20] Dans l’intérêt des Juifs empêtrés dans les pratiques frontalières canadiennes, la JIAS a établi un bon bilan en matière d’intervention en faveur des immigrants détenus.[21]
Les années 1920 ont été marquées par d’importants partenariats en matière d’immigration visant à favoriser la colonisation agricole, notamment les accords sur les chemins de fer, et les organisateurs juifs en ont pris note et ont créé la Canadian Jewish Farm School, à Georgetown, en Ontario. Le projet a suscité la curiosité (et le scepticisme) de la communauté juive de Toronto. Dirigé avec énergie par un agriculteur juif ayant une formation ou une expérience des pratiques agricoles des deux côtés de l’Atlantique, Morris Saxe, le projet a aussi suscité l’intérêt de la JIAS.[22] Considérée comme un moyen potentiel d’accueillir des Juifs malgré l’hostilité antisémite du ministère d’Immigration, la ferme-école s’est heurtée à des obstacles initiaux, mais a obtenu quelques autorisations pour accueillir des élèves immigrants en 1925. Ces permis ont donné lieu à des centaines de demandes, à des tentatives de corruption et, en fin de compte, à la corruption au sein de l’administration de l’école.[23] Dans les années 1920, les immigrants étaient souvent sous la pression d’intermédiaires sans scrupules, et la ferme-école s’inscrivait directement dans le modèle de sa cohorte industrielle. Des « agents » vendaient des permis ou d’autres services liés à l’immigration, exploitant parfois la vulnérabilité des immigrants pour leur extorquer de l’argent ou les escroquer en leur faisant de fausses promesses d’assistance.[24] Alors que la JIAS avait été créée en partie pour surmonter ou au moins contourner cette corruption, elle a elle-même été assaillie par des scandales de favoritisme et de corruption dans les années 1920, ce qui a mené à une réorganisation.[25]
Entre-temps, Saxe nageait constamment à contre-courant au sein de la communauté juive et exigeait que des agriculteurs crédibles s’inscrivent à son école, s’aliénant ainsi des intérêts allant de l’humanitaire au pécuniaire, et même des amis personnels, mais s’attirant le soutien attentif de F.C. Blair à la Direction de l’immigration.[26] Il a également reçu des fonds d’un bienfaiteur européen, qui a mis au point un plan avec Saxe et le ministère de l’Immigration pour faire venir près de quarante enfants juifs au Canada. La garantie d’une véritable participation agricole a légèrement ouvert la porte, mais le plan a été confronté à des défis et, malgré la formation des enfants, il y a eu peu de placements disponibles dans les exploitations agricoles.[27] La communauté juive résidant au Canada s’intéressait peu à l’agriculture, et Saxe mis à part, peu de dirigeants ont fait l’effort de construire et d’entretenir des fermes ou des communautés agricoles. Comme l’a résumé Jack Lipinsky, « l’idéal du “retour à la terre” ne s’appliquait qu’à la Palestine dans les années 1920. »[28]
Fermer les portes
L’influence de l’antisémitisme national s’est maintenue au-delà des années 1920 et dans les années 1930, lorsque les effets de la Grande Dépression ont commencé à se faire sentir. L’effondrement économique s’est conjugué aux pressions environnementales, provoquant de graves perturbations dans les industries canadiennes. En 1930-1931, le gouvernement canadien a réagi à la Grande Dépression en appliquant de sévères restrictions à l’entrée sur le territoire. Les nouvelles règles limitent l’immigration aux sujets britanniques et américains ou aux agriculteurs ayant de l’argent, à certaines catégories de travailleurs et à la famille immédiate des résidents canadiens. Le résultat de cette fermeture a été spectaculaire. Dans les années 1930, environ 16 000 immigrants sont entrés au Canada en moyenne par an, ce qui représente une baisse considérable par rapport à la moyenne d’environ 126 000 par an dans les années 1920.[29]
L’avènement de cette pratique d’exclusion des immigrants a eu lieu peu de temps avant l’arrivée au pouvoir du parti nazi en Allemagne, dont la persécution violente des Juifs était un principe idéologique central. Les politiques de ce parti sont passées de l’exclusion interne des Juifs au génocide après leur accession au pouvoir en 1933. Cependant, dès que les pressions exercées par certains Juifs pour obtenir une admission humanitaire sont devenues évidentes, les autorités canadiennes ont rapidement défini les pratiques et la rhétorique qui allaient barrer la porte à des milliers d’immigrants juifs potentiels, alors même que la violence à leur encontre s’intensifiait. Frederick C. Blair, directeur de l’Immigration, écrit à son collègue Oscar D. Skelton, sous-secrétaire d’État aux affaires extérieures, à la fin de l’année 1933, qu’« une application stricte des règlements existants en matière d’immigration n’apportera aucune solution, en ce qui concerne le Canada, aux problèmes des Juifs ou d’autres réfugiés... Une fois qu’un réfugié a quitté l’Allemagne et qu’il est parti vivre dans un autre pays, le problème des passeports est susceptible de se poser également... » Blair a conclu sa lettre en soulignant que son ministère détenait « un dossier considérable de documents sur lesquels figurent de nombreuses protestations d’organisations et d’individus au Canada contre un mouvement de Juifs allemands vers ce pays. »[30]
L’un des rares moyens dont le CJC disposait pour contrer cette discrimination bien ancrée était d’impliquer les agents d’immigration dans leur domaine de prédilection : l’agriculture. Suite au durcissement des attiudes et des politiques de la Direction de l’immigration, le Congrès juif canadien a entrepris une initiative agricole en 1934. Le Congrès a acheté des terres au Manitoba par l’intermédiaire d’un agent et a établi une petite colonie pour neuf familles ainsi qu’une propriété de formation agricole pour les jeunes à proximité.[31] Pendant la Dépression, ce projet n’était pas tant une question d’accomplissement réel qu’une réponse aux idées préconçues de l’esprit populaire et de la politique d’immigration qui plaçaient les Juifs en dehors de la catégoie agricole « préférée ».[32] Cependant, cela n’a guère contribué à ébranler les idées préconçues qui animaient et encadraient la politique d’immigration canadienne dans les années 1930 : comme l’ont décrit les historiens Irving Abella et Harold Troper, même les fermiers juifs ayant fait l’objet d’un examen approfondi avaient peu de chances d’être admis, compte tenu des préjugés des fonctionnaires canadiens. La demande d’inscription en tant qu’agriculteur était considérée avec suspicion si le demandeur était juif, et le ministère recherchait un capital important parmi ceux qui cherchaient à s’établir dans l’agriculture.[33] Même avec une personne aussi influente que Samuel Bronfman à la tête du CJC, poste qu’il a pris en 1938, le ministère de l’Immigration a tenu fermement à sa politique de plus en plus restrictive et antisémite.[34]
Cela ne s’explique pas par une méconnaissance de la souffrance des Juifs en Europe, ni même de leur danger immédiat : En 1938, Blair a déclaré qu’il « doutait fort que d’autres pays soient en mesure de sauver nombre de ces personnes d’une plus grande misère ou même de l’extinction. » [35]
De toute évidence, l’antisémitisme était bien ancré au sein des services d’immigration canadiens de l’époque. Dans une autre lettre de 1938, Blair a écrit qu’il « pourrait être très bon d’organiser une conférence et d’avoir une journée d’humiliation et de prière, qui pourrait profitablement être prolongée à une semaine ou plus, où [les juifs] auraient à expliquer honnêtement pourquoi ils sont si peu populaires à travers le monde. » Plus tard, en 1938, le haut commissaire du Canada pour la Grande-Bretagne, Vincent Massey, a écrit que le Canada devrait être généreux en acceptant des Allemands aryens du Sudetenland, afin de pouvoir éviter d’accepter des réfugiés non aryens plus tard. En janvier 1939, le député libéral Wilfrid Lacroix exprime son opposition face à l’admission de réfugiés et a présenté une pétition signée par près de 130 000 Canadiens membres de la Société Saint-Jean-Baptiste, demandant la prévention de l’immigration juive. Deux mois avant le départ du Saint Louis, un autre député a envoyé à Blair une copie de la soidisant prophétie de Franklin, un faux crédo antisémite rédigé par Benjamin Franklin.[36]
Il n’en reste pas moins que de réelles pressions ont été exercées par des personnes en dehors de la communauté juive pour obtenir des admissions. En 1938, les hauts responsables de la colonisation du Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP) et de la Compagnie des chemins de fer du Canadien National (CN) ont rencontré les plus hauts fonctionnaires fédéraux chargés de l’immigration (A.L. Joliffe, commissaire à l’Immigration, et F.C. Blair, directeur de l’Immigration) à Ottawa, dans le bureau de Blair. Le sujet était « l’inclusion possible de familles d’agriculteurs juifs dans l’effort de colonisation qui comprend maintenant des colons de divers pays d’Europe. »[37] Cette discussion était importante : au cours des cinq dernières années de la décennie 1920, par exemple, les deux compagnies ferroviaires avaient collaboré avec le gouvernement fédéral pour faire venir près de 200 000 immigrants au Canada pour qu’ils deviennent fermiers ou ouvriers agricoles.[38] Contrairement à l’arrangement utilisé dans le cadre de ce programme, dans lequel les chemins de fer étaient entièrement responsables du recrutement des colons, les fonctionnaires du ministère de l’Immigration ont pris la responsabilité d’évaluer la faisabilité de l’installation des candidats juifs, leurs dossiers approuvés devant être partagés à parts égales entre les chemins de fer. Les agents d’immigration ont donc dû réexaminer le processus de séparation des cas immédiatement et permettre à chaque partie d’entreprendre ses propres recrutements.[39] Même avec l’implication de ces grands transporteurs, la communauté juive avait encore un rôle à jouer : un rapport du CN sur l’installation réussie de réfugiés européens en 1939 indique que nombre d’entre eux avaient reçu une aide du Congrès juif canadien. Certains avaient suffisamment de capital et d’expérience dans l’agriculture pour renoncer à l’aide de la communauté canadienne. Par exemple, Jankiel Szapiro et sa famille sont arrivés au Quai 21 à bord du Batory à la fin du mois de mai 1939 pour s’installer dans une ferme au Manitoba avec son frère Mendel, par l’intermédiaire du service de la colonisation et de l’agriculture du CN.[40] Cependant, alors même qu’ils débarquaient, des centaines d’autres Juifs se trouvaient en mer à bord du MS Saint Louis, cherchant refuge aux Amériques, et le Canada n’acceptait pas leur entrée.
Le Saint Louis et le Canada
Le MS Saint Louis était un paquebot bien équipé de 17 000 tonnes appartenant à la Hamburg-America Line, inauguré en 1929 pour assurer la traversée transatlantique entre Hambourg et New York.[41] Le 13 mai 1939, le navire s’élance sur une croisière spéciale de Hambourg, en Allemagne, vers La Havane, à Cuba. À son bord, le Saint Louis comptait 937 passagers, la majorité des Allemands juifs qui avaient été violemment persécutés par l’État nazi. Ils avaient obtenu des visas touristiques cubains, qui étaient attrayants pour plusieurs raisons. D’abord, ces visas n’exigeaient pas de prouver le droit de retour. Ensuite, les visas étaient disponibles (en échange d’un pot-de-vin). Finalement, Cuba était très proche des États-Unis (É.-U.) La majorité des passagers étaient sur des listes d’attente pour entrer aux É.-U. ou avaient de la famille là-bas.
À l’insu des passagers, le président cubain Laredo Brú avait élargi les exigences documentaires pour les touristes étrangers avant le départ du navire de l’Allemagne. L’antisémitisme national cubain, les conflits politiques internes, et la corruption ont tous contribué à ce nouveau règlement (Décret no 937), qui est effectivement devenu un obstacle complet à l’entrée des passagers à bord du Saint Louis. Seuls vingt-huit passagers ont pu débarquer à La Havane après l’arrivée du navire le 27 mai. Le reste des passagers a vécu une série de délais et de refus de la part du gouvernement cubain. Éventuellement, le Saint Louis, qui transportait encore 907 passagers, s’est fait ordonner de quitter les eaux cubaines le 2 juin.[42]
Pendant cette épreuve, les passagers ont demandé de l’aide et l’asile aux États-Unis, et ont aussi communiqué avec des pays d’Amérique centrale pour trouver refuge. L’opinion américaine était que les passagers ne pouvaient être admis, et bien que le capitaine Captain Gustav Schröder ait considéré un débarquement illégal des passagers en Floride, il aurait été dangereux d’approcher suffisamment le Saint Louis de la côte.[43] Après plusieurs jours d’échec des négociations, le Saint Louis a finalement quitté les eaux entre la Floride et Cuba le 7 juin, en direction de l’Europe.[44]
Ce soir-là, un groupe de Canadiens éminents dirigés par l’historien et professeur George Wrong a envoyé une pétition par télégraphe au premier ministre William Lyon MacKenzie King, qui était à bord du train royal à Niagara Falls, en Ontario. Les signataires de la pétition ont suggéré que King « offre, sans délai, aux 907 exilés sans domicile à bord du navire Hamburg-American Saint Louis l’asile au Canada. »[45] La réponse de King était d’ordonner à Oscar D. Skelton, Ph.D., sous-secrétaire des affaires externes, de consulter le ministre de la Justice, Ernest Lapointe, et le directeur de l’Immigration, Frederick Blair, car il voulait « être conseillé immédiatement au sujet des pouvoirs du gouvernement afin de répondre à la suggestion contenue dans la communication ». Il demande aussi qu’ils envoient une réponse à George Wrong.[46]
Au Canada, le parlement ne siégeait pas. Le Cabinet ne prévoyait pas de réunion avant une semaine suivant la demande de King. De surcroît, le ministre responsable de l’immigration, c’est-à-dire le ministre des Mines et Ressources Thomas Crerar, ne serait pas de retour à Ottawa avant le 19 juin. Lapointe a pris du temps uniquement pour exprimer son opposition à l’accueil des passagers avant de quitter Ottawa le soir du 8 juin, avec un retour prévu le 13 juin.[47] Par conséquent, ces jours cruciaux pour les passagers du Saint Louis ont eu lieu au moment d’une absence de pouvoir à Ottawa. Après la réaction initiale de Lapointe, qui semble avoir été la seule opinion formulée sur la situation de la part d’un fonctionnaire élu à l’exception du premier ministre, Blair et Skelton se sont retrouvés obligés de formuler une réponse canadienne à la situation des réfugiés au nom de King.
La première réponse de Blair à la demande de Skelton et King a été de décrire en détail les pouvoirs dont King disposait pour accepter les passagers du Saint Louis à l’aide d’un décret en conseil. Cette réponse mérite d’être citée en détail :
Pour répondre à la demande du premier ministre en ce qui concerne les pouvoirs du gouvernement d’accorder ce qui est demandé, je peux dire que la majorité des règlements qui empêchent le déplacement libre des gens au Canada à partir de l’Europe ont lieu par décret en conseil. Et, supposant que ces réfugiés sont en bonne santé et de bonne moralité, ils pourraient être admis par un décret en conseil général, comme ceux qui sont ratifiés toutes les semaines pour accepter les réfugiés individuels qui y sont nommés.[48]
Dans sa note à l’intention de Skelton, Blair passe de cette explication du processus possible d’admission à un argument en défaveur de l’accueil des réfugiés. Il explique que le tollé national à l’égard de l’accueil généralisé de réfugiés juifs serait contraire à « ce que nous faisons de façon moins spectaculaire en créant des listes aux quelques jours », faisant référence aux listes de noms d’immigrants qui accompagnaient les décrets en conseil pour l’accueil de gens qui n’étaient autrement pas admissibles à entrer au pays. (Une portion importante des personnes acceptées par ces « listes » était juive.) Skelton a renchéri sur le conseil de Blair avec un télégramme à l’intention de King, mais seulement après une conversation avec Blair sur l’heure du midi. Pendant ces conversations, Blair et Skelton ont dit à King que seules des personnes de quatre groupes spécifiés (familles, investisseurs, entrepreneurs et immigrants très qualifiés) pouvaient être acceptées par décret en conseil.[49]
La raison politique pour limiter les admissions par décret en conseil à ces quatre groupes n’est pas claire. La note ultérieure de Blair à l’intention de Skelton au sujet des passagers du Saint Louis affirme simplement que les passagers « n’auraient pas pu être admis autre qu’en les nommant dans un décret en conseil spécial, puisqu’aucun d’entre eux, à notre connaissance, n’a pu se conformer au règlement d’immigration canadien. »[50] Cette implication va dans le sens de la première réponse de Blair : les passagers étaient admissibles à l’aide d’un décret en conseil approprié. De surcroît, la disponibilité de permis ministériels pour contourner les dispositions de la Loi sur l’immigration en permettant l’entrée à des immigrants inadmissibles dans certaines circonstances justifiables ne semble pas être entrée dans la conversation du tout, mais l’absence de Crerar pourrait avoir empêché Skelton et Blair de suggérer cette possibilité.[51]
Par conséquent, King n’a pas reçu de conseils au sujet des pouvoirs gouvernementaux de décider en faveur de l’accueil des passagers. Le premier ministre a plutôt reçu un avis sur les règlements d’immigration restrictifs, de même qu’une description limitée de ceux qui pourraient être acceptés par décret en conseil. Dans son ensemble, il s’agit de conseils indiquant que les passagers du Saint Louis n’étaient pas admissibles.
Blair a écrit à Skelton une semaine après l’échange initial. Dans cette note, il énonce certains des arguments contre l’admission : le besoin d’un décret en conseil spécial, le fait que la majorité des réfugiés comptaient résider de façon permanente aux États-Unis, et le précédent potentiel pour d’autres réfugiés de la persécution allemande. Blair a aussi indiqué qu’« aucune demande n’a été faite par le navire, et à notre connaissance, par les passagers, pour demander l’accueil au Canada », ce qui est cohérent avec l’itinéraire du navire : le Saint Louis ne s’est pas dirigé vers le Canada ou les eaux canadiennes.[52] Ces arguments, combinés à une attitude rigide envers l’application des politiques d’immigrations extrêmement restrictives du Canada pendant la Grande Dépression, constituaient le cœur des conseils brefs et exclusionnaires envoyés par Skelton à King le 9 juin.
D’autres lettres de pétition ont été envoyées au gouvernement, mais Lapointe, Blair, et Skelton n’ont pas bougé en matière d’inaction ou d’exclusion. Ils pourraient avoir été protégés d’un examen plus poussé par des faux reportages sur des solutions d’asile qui ont paru pendant que les réfugiés n’avaient pas de destination certaine entre le 2 et le 13 juin. Des reportages contradictoires, disant que les passagers avaient trouvé refuge à Cuba, en Dominique, et ailleurs, ont paru dans les journaux canadiens et pourraient avoir émoussé le sentiment d’urgence lié à l’offre d’un asile à ces passagers au Canada.[53] La confusion de la part de la presse pourrait être excusée par le fait que le Joint Distribution Committee américain (JDC, un organisme juif de défense et d’aide qui a œuvré au nom des réfugiés juifs européens) avait l’opinion interne, jusqu’au 8 juin, que Cuba pourrait encore changer d’avis.[54] King a été témoin de la considération de l’affaire par le gouvernement américain, et des interactions avec le JDC alors qu’il voyageait à bord du train royal en compagnie du président Franklin D. Roosevelt, et il semble n’avoir ressenti aucune obligation d’action de la part du Canada. Il a consigné dans son journal personnel que la situation des réfugiés est « bien moins notre problème que celui des États-Unis ou de Cuba », et a perçu, dans le courant de ses conversations avec Roosevelt, qu’une résolution était encore en déroulement.[55] Une citation de Blair, écrite pendant la crise du Saint Louis, reste à ce jour le résumé le plus connu de l’intervention du Canada : « Il est manifestement impossible pour n’importe quel pays d’ouvrir ses portes assez grand pour accueillir les centaines de milliers de juifs qui veulent quitter l’Europe : il faut tirer la ligne quelque part. »[56]
L’après-coup : les passagers et la politique
Les passagers ont pu entreprendre un retour en Europe sécuritaire grâce au JDC, qui a convenu d’une entente d’asile de dernière minute, annoncée le 13 juin. Les passagers réfugiés ont été distribués entre les Pays-Bas (181), la Belgique (214), la France (224), et le Royaume-Uni (288).[57] Cependant, la Deuxième Guerre mondiale a éclaté peu de temps après leur retour en Europe, et en 1940, plus de six cents de ces passagers étaient désormais dans des territoires sous occupation nazie. Les chercheurs Sarah Ogilvie et Scott Miller ont révélé que 254 des passagers ont été tués dans l’holocauste; un autre passager est aussi décédé dans les attaques aériennes allemandes qui ont suivi en Grande-Bretagne.[58]
Selon l’historienne Adara Goldberg, cet événement « a laissé une tache indélébile sur le pays. Il s’agit d’un argument pour les changements de politique et d’une force motrice pour les actions gouvernementales, dans la période d’après-guerre. »[59] Il n’y a certainement pas eu de changement immédiat. Pas à temps pour bénéficier aux Juifs d’Europe. Malgré cette intransigeance, le Canada a admis par inadvertance un seul grand mouvement de réfugiés juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Parmi les « étrangers ennemis » envoyés au Canada par le Royaume-Uni pour y être internés, 2 300 étaient des évadés de la terreur nazie, pour la plupart juifs.[60] Le Canada disposait d’un vaste réseau de camps d’internement pendant la Seconde Guerre mondiale, où étaient détenus environ 34 000 prisonniers de guerre allemands, ainsi que des réfugiés accidentels.[61] Un mouvement constant d’assouplissement des conditions de vie des réfugiés et de libération s’est opéré en temps de guerre. À la fin de la guerre, un millier d’anciens internés ont choisi de rester au Canada en tant qu’immigrés.[62]
Cette contribution accidentelle à la réinstallation des réfugiés juifs mise à part, le bilan du Canada en matière d’admission des réfugiés est catastrophique. Les discussions sur l’entrée des réfugiés au Canada pendant la guerre ont été délibérément peu concluantes, l’obstruction et l’obscurcissement étant les deux principaux objectifs (et pratiques) bureaucratiques des fonctionnaires canadiens des ministères de l’Immigration et des Affaires externes. Le résumé proposé par Abella et Troper concernant la Conférence des Bermudes de 1943, à savoir que les efforts « ont échoué avec succès », est approprié tout au long des années de guerre.[63] La politique canadienne à l’égard des réfugiés, telle qu’annoncée par le premier ministre King, est de « gagner la guerre aussi rapidement et complètement que possible... les efforts pour les aider prolongeraient leur agonie si ces efforts devaient prolonger la guerre. »[64] Néanmoins, environ 5 000 Juifs sont entrés au Canada au cours des années 1930. Pendant la guerre, il y a eu un tout petit nombre d’admissions régulières par l’entremise des « listes » du décret Blair référencées lors de son refus de Saint-Louis.[65]
Après la Seconde Guerre mondiale, le ministère de l’Immigration a été confronté à la discussion sur le fonctionnement et les conséquences de l’antisémitisme dans ses politiques par Saul Hayes, alors directeur exécutif du CJC. Cet avis, ainsi que d’autres conseils donnés à la commission sénatoriale sur l’immigration et le travail, se traduit par l’avis clair de la commission selon lequel la discrimination fondée sur la race et la religion doit être exclue de la politique d’immigration, tout en préservant la distinction établie par la politologue Freda Hawkins, selon laquelle les limites imposées à des groupes tels que les Asiatiques sont compatibles avec la « capacité d’absorption » du pays.[66] Dans le cadre des changements importants de politique et de l’arrivée après la guerre de personnes déplacées et de réfugiés de toutes sortes, le gouvernement canadien a admis 35 000 survivants de l’Holocauste.[67]
La coda de la longue histoire de l’exclusion antisémite et du refus d’accorder l’asile aux passagers du MS Saint Louis reflète un impact significatif et durable sur les pratiques et la politique en matière d’immigration. Lorsqu’une nouvelle crise des réfugiés s’est profilée dans les années 1970, l’histoire des exclusions antisémites racontée par Irving Abella et Harold Troper dans None Is Too Many a influencé le ministre de l’Immigration de l’époque, Ron Atkey, et « l’a encouragé à ne pas se comporter de la même manière insensible qu’un précédent gouvernement avait repoussé les Juifs d’Europe. »[68] Peu après, le gouvernement fédéral s’est empressé d’accueillir de nombreux réfugiés parmi les « Boat People », une intervention décisive et généreuse qui a contribué à ce que le peuple canadien reçoive la médaille Nansen du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés en 1986.
- Canada, Chambre des communes, Débats de la Chambre des communes, Hansard numéro 351, 42e législature, 1re session, 7 novembre 2018, premier ministre Justin Trudeau, « Excuses aux réfugiés juifs », 1515ff. Il faut remarquer que, malgré la formulation des excuses, le MS Saint Louis ne s’est jamais dirigé vers un port canadien.↩
- Richard Menkis, « Antisemitism and Anti-Judaism in Pre-Confederation Canada », dans Alan Davies, éd., Antisemitism in Canada (Waterloo : Presses de l’Université Wilfrid Laurier, 1999), 12.↩
- Menkis, « Antisemitism and Anti-Judaism in Pre-Confederation Canada », 12.↩
- Menkis, « Antisemitism and Anti-Judaism in Pre-Confederation Canada », 24.↩
- John C. Lehr, « It seems we talk a lot: The Jewish Farm Colony at Rosser and the Vanguard Project », Prairie History (été 2020), 26.↩
- Theodore H. Friedgut, « Jewish Pioneers on Canada’s Prairies: The Lipton Jewish agricultural colony », Jewish History 21:3 (2007), 385.↩
- Adara Goldberg, Holocaust Survivors in Canada: Exclusion, Inclusion, Transformation, 1947-1955 (Winnipeg : Presses de l’Université du Manitoba, 2015), 10-11.↩
- Friedgut, « Jewish Pioneers », 386.↩
- Friedgut, « Jewish Pioneers », 388-390. Même les partisans de l’immigration juive considèrent souvent que les immigrants sont souhaitables en nombre limité et conformément à leurs stéréotypes concernant la participation et la contribution probables des Juifs au Canada.↩
- Gerald Friesen, The Canadian Prairies: A History (Toronto : Presses de l’Université de Toronto, 1987), 263.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, RG 76, Programme d’immigration, volume 12, dossier 76, « E.M. Clay, Immigration Agent, Halifax, Nova Scotia », E.M. Clay à A.M. Burgess, Halifax (Nouvelle-Écosse), 28 septembre 1893; Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, Programme d’immigration, volume 15, dossier 142, « Immigration Building, Halifax, Nova Scotia », Partie 3, F.W. Annand à F. Pedley, Halifax (Nouvelle-Écosse), 17 janvier 1901.↩↩
- Howard Palmer, « Strangers and Stereotypes: The rise of nativism, 1880-1920 », dans R. Douglas Francis et Howard Palmer, éd., The Prairie West: Historical Readings (Edmonton : Pica Pica Press, 1992), 313-315; la citation directe est tirée de la p. 315.↩
- Friesen, The Canadian Prairies, 263-265.↩
- Friedgut, « Jewish Pioneers », 405.↩
- Lehr, « It seems we talk a lot », 27.↩
- Goldberg, Holocaust Survivors, 17.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, Statuts du Canada, « Loi modifiant la Loi de l’immigration, 1919 », (Ottawa : SC 9-10 George V), chapitre 25 consulté dans https://quai21.ca/recherche/histoire-d-immigration/loi-de-l-immigration-amendement-1919↩
- Gerald Tulchinsky, Branching Out: The Transformation of the Canadian Jewish Community (Toronto : Stoddart Publishing, 1998), 34-35.↩
- Tulchinsky, Branching Out, 39.↩
- Canada, Bureau fédéral de la statistique, Annuaire du Canada 1913 (Ottawa : Imprimeur du Roi, 1914), 108; aussi Annuaire du Canada 1920, 120-122.↩
- Tuichinsky, Branching Out, 46-47.↩
- Jack Lipinsky, « Immigration Opportunity or Organizational Ozymoron? The Canadian Jewish Farm School and the Department of Immigration, 1925-46 », dans Canadian Jewish Studies 21 (2013), 52-54.↩
- Lipinsky, « Canadian Jewish Farm School », 55-56.↩
- Tulchinsky, Branching Out, 40.↩
- Tulchinsky, Branching Out, 41.↩
- Lipinsky, « Canadian Jewish Farm School », 57-58.↩
- Lipinsky, « Canadian Jewish Farm School », 60.↩
- Lipinsky, « Canadian Jewish Farm School », 62.↩
- Lindsay Van Dyk, « Décret du Conseil CP 1931-695 », entrée de journal Web, consulté sur https://quai21.ca/recherche/histoire-d-immigration/decret-du-conseil-cp-1931-695-1931 le 16 décembre 2014; Bureau fédéral de la statistique, Annuaire du Canada 1945 (Ottawa : Edmond Cloutier, 1945), 168; Bureau fédéral de la statistique, Annuaire du Canada 1946 (Ottawa : Edmond Cloutier, 1946), 185.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds de la Direction de l’immigration, RG 76, Vol. 391, Dossier 541782, « Immigration to Canada of Jews from Europe », Blair à Skelton, Ottawa (Ontario), 6 novembre 1933.↩
- Lehr, « It seems we talk a lot », 28.↩
- Lehr, « It seems we talk a lot », 32.↩
- Irving Abella et Harold Troper, None Is Too Many: Canada and the Jews of Europe, 1933-1948 (Toronto : Presses de l’Université de Toronto, 2012), 54-55.↩
- Goldberg, Holocaust Survivors, 19.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, RG 76, Volume 391, Dossier 541782 Partie 5, « Immigration to Canada of Jews from Europe », Blair au révérent chanoine Canon W.W. Judd, secrétaire général du Conseil des services sociaux de l’Église d’Angleterre au Canada, Ottawa (Ontario), 18 octobre 1938.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, RG 76, Volume 391, Dossier 541782 Partie 5, « Immigration to Canada of Jews from Europe », lettre confidentielle de Blair à M. F. Sclanders, commissaire, Chambre de commerce de Saint John, Ottawa (Ontario), 19 septembre 1938; télégramme confidentiel codé de Massey à King, Londres (Royaume-Uni), 29 novembre 1938; Canada, Débats de la chambre des communes, 30 janvier 1939 (Wilfrid Lacroix), consulté sur http://www.lipad.ca/full/permalink/1168496/; et aussi dans le dossier 541782 précédemment énoncé, lettre confidentielle de H.E. Brunelle à Blair, Ottawa (Ontario), 16 mars 1939↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de l’Emploi et de l’Immigration, RG 76, Volume 391, Dossier 541782 Partie 5, « Immigration to Canada of Jews from Europe », note de réunion, apparemment par et pour F.C. Blair, Ottawa (Ontario), 19 avril 1938.↩
- Ninette Kelley et Michael Trebilcock, The Making of the Mosaic: A History of Canadian Immigration Policy (Toronto : Presses de l’Université de Toronto, 2010), 198-199.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du Ministère de l’Emploi et de l’Immigration, RG 76, Volume 391, Dossier 541782 Partie 5, « Immigration to Canada of Jews from Europe », note de réunion, apparemment par et pour F.C. Blair, Ottawa (Ontario), 19 avril 1938; et Blair au Dr W.J. Black, directeur, ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, Chemins de fer du Canadien National, Ottawa (Ontario), 30 avril 1938.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds de la Compagnie des chemins de fer Canadien National, R231-3539-7-E, Vol. 15849, Boîte 5647, Dossier 91, « Examples of Settlement of European Refugee Families on Land, 1939 », consulté sur https://recherche-collection-search.bac-lac.gc.ca/fra/accueil/notice?app=FonAndCol&IdNumber=4276610&q=edenbridge. Il est intéressant de noter que le livret sur les « réfugiés européens » porte une annotation manuscrite, « livret juif », dont l’origine n’est pas claire.↩
- Arnold Kludas, Great Passenger Ships of the World, Volume 3: 1924-1935 (Londres : Patrick Stephens, 1976), 116.↩
- C. Paul Vincent, « The Voyage of St. Louis Revisited », Holocaust and Genocide Studies 25:2 (automne 2011), 255-257. En ce qui concerne le nombre de passagers, il faut noter qu’un passager est mort en mer avant l’arrivée du Saint Louis à Cuba, et un autre a tenté le suicide dans le port de La Havane, et a été hospitalisé à Cuba.↩
- United States Coast Guard, « What was the Coast Guard’s Role in the SS St. Louis affair (otherwise known as the “Voyage of the Damned”)? », http://www.history.uscg.mil/Frequently-Asked-Questions/, consulté le 29 septembre 2017. Schroeder a aussi pensé à s’échouer en Angleterre plus tard dans le voyage. Voir Vincent, 270-271.↩
- Les reportages au début de juin au Canada déclaraient l’existence d’offres de refuge pour les passagers du Saint Louis en Dominique, à Saint-Domingue, et à Cuba. Voir les pages couvertures du Globe and Mail des 3 et 6 juin 1939, et la page couverture du Toronto Star du 3 juin 1939.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, documents de William Lyon Mackenzie King, volume 262, télégraphe de George Wrong à King, 7 juin 1939, Toronto, Ontario, bobine de microfilm C-3751, item 238579.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de l’Emploi et de l’Immigration, RG 76, volume 440, dossier 670224 « Department of External Affairs - Confidential telegrams to Prime Minister at Washington, D.C., United States, on immigration matters (German Jews on SS ST. LOUIS) », télégraphe de King à Skelton, Parkton, Maryland, 8 juin 1939. Il y avait un passé personnel entre Wrong et King, y compris une protestation véhémente de la part de King et d’autres personnes au journal étudiant Varsity de l’Université de Toronto au sujet de la nomination de Wrong comme professeur à l’université, et possiblement des rancunes de la part de King envers Wrong pour des mauvaises notes. Voir Bibliothèque et Archives Canada, journaux de William Lyon Mackenzie King, 9 février 1895; Martin Friedland, The University of Toronto: A History (Toronto : Presses de l’Université de Toronto, 2013), 164; et le Globe and Mail des 4 et 9 février 1895.↩
- Dossier 670244, Skelton à King, Ottawa, Ontario, 9 juin 1939↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de l’Emploi et de l’Immigration, RG 76, volume 440, dossier 670224 « Department of External Affairs - Confidential telegrams to Prime Minister at Washington, D.C., United States, on immigration matters (German Jews on SS ST. LOUIS) », Blair à Skelton, Ottawa (Ontario), 9 juin 1939.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, RG 76, volume 440, dossier 670224 « Department of External Affairs - Confidential telegrams to Prime Minister at Washington, D.C., United States, on immigration matters (German Jews on SS ST. LOUIS) », Skelton à King, Ottawa (Ontario), 9 juin 1939; dossier 670224, Blair à Skelton, Ottawa (Ontario), 9 juin 1939; et Skelton à Blair, Ottawa (Ontario), 9 juin 1939.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de l’Emploi et de l’Immigration, RG 76, volume 440, dossier 670224 « Department of External Affairs - Confidential telegrams to Prime Minister at Washington, D.C., United States, on immigration matters (German Jews on SS ST. LOUIS) », Blair à Skelton, Ottawa (Ontario), 16 juin 1939.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, Lois du Canada, « L’Acte d’immigration, 1910 », Ottawa : SC 9-10 Edward VII, chapitre 27, Section 4.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de l’Emploi et de l’Immigration, RG 76, volume 440, dossier 670224 « Department of External Affairs - Confidential telegrams to Prime Minister at Washington, D.C., United States, on immigration matters (German Jews on SS ST. LOUIS) », Blair à Skelton, Ottawa (Ontario), 16 juin 1939; Holocaust Memorial Museum des États-Unis, « Voyage of the St. Louis – Animated Map », consulté sur https://www.ushmm.org/wlc/en/media_nm.php?ModuleId=10005267&MediaId=3544↩
- Parmi les faux reportages de refuge, on compte « Cuba Consents to Admit Jews », Montreal Gazette, 6 juin 1939; « Dominica Offers Haven to Refugees Barred at Havana », Globe and Mail, 3 juin 1939; « Santo Domingo Offers Home for 907 Jews Cuba Rejects », Toronto Daily Star, 3 juin 1939↩
- Paul Baewald, président du JDC, à Morris Troper, directeur européen du JDC, Londres (Royaume-Uni), 8 juin 1939, Holocaust Memorial Museum des États-Unis, Photographie 38560, consulté sur https://collections.ushmm.org/search/catalog/pa1127112↩
- Bibliothèque et Archives Canada, journaux de William Lyon Mackenzie King, MG26-J13, 8 juin 1939, consulté sur https://recherche-collection-search.bac-lac.gc.ca/fra/accueil/notice?app=diawlmking&IdNumber=20412&q=Item%2020412&ecopy=50003UQZ↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, RG 76, volume 440, dossier 670224 « Department of External Affairs - Confidential telegrams to Prime Minister at Washington, D.C., United States, on immigration matters (German Jews on SS ST. LOUIS) », Blair à Skelton, Ottawa (Ontario), 16 juin 1939, emphase ajoutée. Concernant l’influence de la phrase, considérer l’article d’Irving Abella et Harold Troper, « The Line Must Be Drawn Somewhere: Canada and Jewish Refugees, 1933-1939 », dans Canadian Historical Review, 60:2 (1979) 178-209, qui devient un chapitre de leur ouvrage de référence, None Is Too Many. C’est un bon résumé de l’attitude des fonctionnaires canadiens concernés. Voir « 4 Lands Offer Haven to Jews », Montreal Gazette, 14 et 15 juin 1939; « Europe Finds Homes for Stranded Jews », Toronto Daily Star, 13 juin 1939; « Drifting Jews Offered Haven By 4 Countries », Globe and Mail, 15 juin 1939. Finalement, un article dans le Star du 19 juin contient dans la rubrique « The Jay Walker » un commentaire intitulé Port After Storm: « Près de mille réfugiés juifs du navire à vapeur Saint Louis se verront offrir l’asile dans les grands espaces ouverts de la Grande-Bretagne, des Pays-Bas, de la Belgique et de la France. La population des Amériques était trop dense. »↩
- Sarah Ogilvie et Scott Miller, Refuge Denied: the St. Louis passengers and the Holocaust (Madison : Presses de l’Université du Wisconsin, 2006), 25.↩
- Ogilvie et Miller, Refuge Denied, 174-175; Holocaust Memorial Museum des États-Unis, « Voyage of the St. Louis », consulté sur https://www.ushmm.org/wlc/en/article.php?ModuleId=10005267↩
- Goldberg, Holocaust Survivors, 20.↩
- Paula Draper, « The Paradox of Survival: Jewish Refugees Interned in Canada, 1940-43 », dans Rhonda L. Hinther et Jim Mochoruk, éd., Civilian Internment in Canada: Histories and Legacies (Winnipeg : Presses de l’Université du Manitoba, 2020), 309-312.↩
- Martin F. Auger, « The HARIKARI Club: German Prsioners of War and the Mass Escape Scare of 1944-45 at Internment Campe Grande Ligne, Quebec », Canadian Military History 13:3 (2004), 50.↩
- Eric Koch, Deemed Suspect: A Wartime Blunder (Halifax : Formac, 1985), 255.↩
- Abella et Troper, None Is Too Many, 148.↩
- Abella et Troper, None Is Too Many, 152.↩
- Bibliothèque et Archives Canada, fonds du ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration, RG 26, Vol. 16, « Jewish Immigration 1899-1939 »; et Vol. 87, « Orders-in-Council, Immigration Branch, 1940-1945 ».↩
- Freda Hawkins, Canada and Immigration: Public Policy and Public Concern (Kingston : Presses de l’Université McGill-Queens, 1988), 83-84.↩
- Goldberg, Holocaust Survivors, 234↩
- Irving Abella, « Canada still has much to learn from None is Too Many », Globe and Mail, 26 février 2013, consulté sur https://www.yorku.ca/laps/hist/2013/02/26/canada-still-has-much-to-learn-from-none-is-too-many/↩