Mur de Service
Colonne
17
Rangée
15
War Bride
Je suis une épouse de guerre. Mon pays, la Hollande, a été envahi en mai 1940 par les Allemands. Pendant cinq ans, c’était l’enfer. Il y avait tellement de tristesse et de peur ; on ne savait jamais si les pères et les frères seraient emmenés la nuit pour être transportés en Allemagne ; certains n’en sont d’ailleurs jamais revenus. Puis, au printemps 1945, les libérateurs sont arrivés : les CANADIENS. Ils sont entrés dans mon village en tanks, ils avaient l’air bien nourris et en bonne santé. Quel beau spectacle. À ce jour, il reste gravé dans ma mémoire. Plus de couvre-feu et la fin de la guerre. J’avais alors 18 ans. Après quelques semaines, les Canadiens se sont installés et sont devenus des amis des Hollandais.
J’ai rencontré mon soldat canadien qui était en garnison dans une école. Ils dansaient et s’amusaient, ce qu’on n’avait pas fait depuis longtemps. Le 25 juin 1945, j’ai rencontré Ken, un homme gentil et beau. Nous nous sommes mariés le 27 octobre avec la permission de l’armée canadienne. L’unité de Ken s’est retirée du village en novembre 1945. J’ai alors dû attendre mon tour pour aller au Canada. J’ai quitté la Hollande en août 1946 après avoir attendu longtemps quelque part en Hollande où d’autres épouses de guerre attendaient aussi pour embarquer à bord d’un navire. J’ai pris le Lady Rodney jusqu’en Angleterre pour attendre encore d’autres épouses de guerre et j’ai ensuite pris le train jusqu’à Southampton. De là, je suis partie à bord du Queen Mary. Le navire était grand et la nourriture si bonne. Après trois jours, j’ai eu le mal de mer alors ça a tout gâché.
Nous avons débarqué à Halifax le soir et nous sommes restés à bord jusqu’au matin, ensuite nous avons marché jusqu’au train, de gentilles femmes de la Croix-Rouge nous ont offert du café et des beignets je crois. La voyage en train était long et il y avait beaucoup d’épouses de guerre ; certaines avaient des bébés et des enfants en bas âge. Le train partait pour Montréal. C’est là que j’ai dit au revoir à mes amies de Hollande ; elles partaient pour le sud de l’Ontario et quatre autres filles, moi y compris, partaient au nord de l’Ontario. Pendant trois jours et trois nuits, nous sommes restées dans ce train. Encore une fois, on nous a très bien nourries et on a très bien pris soin de nous. On est enfin arrivées à Port Arthur. Mon mari attendait et le train était en retard de trois heures. Il avait l’air différent, sans uniforme, ensuite il m’a emmené chez lui. Ses parents avaient invités des amis et avaient préparé une table avec des sandwiches et des gâteaux. Ils étaient tous si gentils. Le lendemain nous sommes allés nous promener en voiture (mon mari avait un jour de congé). Il m’a demandé si je voulais un hotdog. Je n’avais pas la moindre idée de ce que c’était mais ce n’était pas trop mal. Il y avait tant à apprendre dans un aussi grand pays.
Mon mari a construit notre première maison avec très peu d’argent et après ses journées de travail. En 1947, nous avons eu une petite fille et ensuite deux garçons. En 1948, mes parents et ma petite sœur ont immigré au Canada. Ma vie dans ce vaste pays était bonne. Mon mari et moi sommes retournés en Hollande plusieurs fois pour les anniversaires de la libération. Ma famille a bien réussi et même si j’aime le Canada, j’aime toujours la Hollande j’ai plaisir à y retourner. Ce pays occupe toujours une grande place dans mon cœur et je pense souvent à comment un évènement dans la vie d’une personne peut changer celle de tellement d’autres. Quand j’étais assise dans ce train, une inquiétude occupait mes pensées, je me demandais si j’allais revoir mon mari. Je me demandais aussi comment les femmes attrapaient leur linge sur ces fils si hauts. On n’avait jamais rien vu de pareil en Hollande.
Je suis de nouveau seule maintenant. Mon mari est décédé il y a deux ans à la suite d’une longue maladie. Il me manque mais je me souviens encore des bons moments et je suis heureuse d’être venue dans ce pays.