Silvano Indri

Mur d'honneur de Sobey

Colonne
192

Rangée
14

First Line Inscription
Silvano Indri
Second line inscription
Maria Pia Giacomello

Che bella la Casetta in Canada - Quelle belle petite maison au Canada

Je me souviens avoir chanté, enfant, un air populaire qui allait comme ceci : « C’erà una casetta piccolina in Canada, con tanti pesciolini et tanti fiori di lilà, e tutte le ragazze che passavano di là, dicevono che bella la casetta in Canada. » C’est ainsi que je pensais à notre maison, une belle petite maison aimante et entourée de jardins fleuris, fondée par mes parents lorsqu’ils sont venus Canada.

Tout a commencé avec mon père, Silvano, né en 1929 à Tauriano, Spilimbergo, dans la région italienne de Frioul-Vénétie-Julienne. Il était le quatrième des cinq enfants de Guido et Regina Indri. La famille Indri a connu des moments difficiles lorsque mon grand-père est revenu d’une bataille de la Première Guerre mondiale avec une blessure à la jambe. Il est décédé à l’âge de 36 ans des suites d’une gangrène, laissant les enfants, âgés de 0 à 13 ans, aux soins de ma grand-mère. Pour gagner sa vie, ma grand-mère tenait un café-trattoria. Son aîné, oncle Primo, a rapidement adopté le rôle de figure paternelle. Il a par conséquent été exempté du service militaire. Bien qu’il n’ait eu qu’un an de moins, oncle Roméo, un musicien talentueux, n’a pas eu cette chance. En 1939, on a signalé que sa division militaire se dirigeait vers l’Union soviétique, puis il a été déclaré disparu au combat. Ma grand-mère a toujours gardé espoir qu’il reviendrait un jour à la maison. Ce n’est que dans les années 1990, grâce à la politique de Glasnostde Gorbatchev, que nous avons enfin pu connaître le sort d’oncle Roméo : il a succombé à une pneumonie dans une prison soviétique à l’âge de dix-neuf ans, alors qu’il était prisonnier de guerre. De leur côté, tantes Iole et Maria ont participé à la gestion de la trattoria jusqu’à ce qu’elles se marient et déménagent dans les villes natales respectives de leurs époux (Berne, en Suisse et Madrisio di Fagagna), comme c’était la coutume à l’époque. Tante Maria était la plus jeune et la plus proche en âge de mon père, et était particulièrement dévouée envers notre famille. Elle nous accueillait chaleureusement chaque fois que nous lui rendions visite.

Bien qu’on voulait de lui au sein de l’entreprise familiale, on l’a également encouragé à apprendre un métier. Il a fréquenté l’établissement Scuola del Mosaico, qui a maintenant une renommée internationale, et est devenu un mosaïste de talent. À l’âge de 16 ans, mon père a d’abord émigré en Suisse, puis en France pour y restaurer les magnifiques églises et musées endommagés par les guerres. En compagnie de pairs de sa ville natale, mon père est parti pour le Canada le 16 mai 1955, poussé par son sens de l’aventure et la promesse d’un bon salaire. Une valise à la main, il a quitté la ville portuaire de Gênes et a traversé l’océan Atlantique à bord du navire Saturnia. Il est arrivé en sol canadien le 25 mai au Quai 21 d’Halifax, en Nouvelle-Écosse.

Avec ses papiers d’immigration en règle et son état de santé évalué, mon père s’est retrouvé dans un train se dirigeant vers la Colombie-Britannique. Après un long voyage de trois jours pendant lequel il n’a pas compris un seul mot de la langue parlée autour de lui, mon père s’est réjoui d’entendre du français lorsque le train est arrivé à Montréal, au Québec. Mon père parlait couramment le français, car il avait déjà travaillé en France. En un clin d’œil, il a décidé de débarquer du train. Une décision qui a changé sa vie et qui a fait en sorte que notre famille s’est établie à Montréal plutôt qu’à Vancouver.

Émigrer de Frioul - La vie au Canada

Pendant des années, mon père a été pensionnaire chez une famille italo-yougoslave et a travaillé dur dans son domaine. Il était courant de trouver des mosaïstes travaillant à garantir la beauté des structures publiques et privées les plus ambitieuses. Lorsque la demande pour les mosaïques a finalement diminué, mon père a mis ses compétences au service du terrazzo et du marbre. Le boom de la construction des années 50, 60 et 70 a donné naissance à une importante classe d’entrepreneurs et mon père a créé sa propre entreprise, Federal Tile. Il s’est joint à des associations, comme la Fogolar Furlan, qui offraient entre autres de l’information en matière de santé, d’éducation et d’emploi, et qui lui ont permis de rencontrer d’autres Italiens partageant leurs aventures au Canada.

En 1958, mon père est retourné dans sa ville natale d’Italie pour épouser sa dulcinée, Maria Pia Giacomello, qui avait huit ans de moins que lui. Au fil des ans, ma mère s’était épanouie en une jeune femme séduisante et leur amitié d’enfance s’était transformée en amour. Ils se sont mariés le 5 juillet, entourés de membres de la famille et d’amis et, à l’âge de 21 ans, ma mère a également fait ses adieux à sa famille afin d’accompagner son époux au Canada. Cette fois, la traversée de l’Atlantique s’est faite en avion plutôt qu’en bateau. Un voyage de 14 heures au cours duquel ma mère n’a jamais quitté des yeux les flammes alimentant leur vol. Mes parents n’étaient pas venus au Canada avec l’intention de s’y installer de façon définitive. Leur objectif était de générer des revenus qui leur permettraient d’améliorer leurs conditions de vie dans leur pays. Comme c’est le cas pour de nombreux immigrants, leurs plans les mieux conçus sont vite tombés à l’eau. Au fur et à mesure que les générations plus âgées qui se trouvaient en Italie sont décédées et que les enfants sont nés au Canada, leurs racines se sont approfondies dans ce pays. Cinq années à l’étranger sont vite devenues dix, dix sont devenues vingt et le rêve a évolué.

En 1962, après avoir perdu son conjoint, ma grand-mère maternelle, Albina, qui n’avait jamais voyagé plus loin que Rome, a décidé de faire ses bagages pour venir rejoindre son unique enfant au Canada. Comme mes parents avant elle, elle a dû apprendre à communiquer dans une nouvelle langue, affronter des hivers rigoureux et acquérir une nouvelle culture. Elle en est venue à échanger son beau manteau italien, ses gants en cuir et ses chaussures contre des parkas, des mitaines et des bottes. Moins élégant, certes, mais plus chaud. Puisque ma mère travaillait comme couturière dans le secteur dynamique de l’habillement de Montréal, ma grand-mère est devenue notre principale gardienne. Elle nous a appris à parler l’italien et a partagé avec nous sa passion pour la cuisine et la danse. Elle nous a également enseigné ce que la détermination, la résilience et la compassion signifient. Des attributs qu’elle a dû mettre à profit lorsqu’à 61 ans, elle a subi un accident vasculaire cérébral Le rôle de soignant a été inversé pendant 34 ans. Mes parents, mes frères et sœurs et moi-même avons répondu à ses besoins. Malgré ces revers, la foi qu’avait Nonna Albina en la famille n’a jamais faibli. Elle est décédée paisiblement dans son sommeil en 1997, une semaine avant son 94e anniversaire et 11 jours après la naissance de son premier arrière-petit-fils.

La prospérité croissante au Canada a permis des voyages plus fréquents en Frioul. Rentrer à la maison était un événement joyeux et revenir au Canada était excitant. Dans les pays européens, mes parents étaient seulement accueillis à titre de travailleurs saisonniers. Ils ont appris à apprécier les nombreuses possibilités offertes aux immigrants venant au Canada, comme l’accès aux soins de santé, à l’éducation et à l’emploi. Des domaines qui permettent aux gens de s’intégrer dans la société et de gravir l’échelle sociale. Les droits démocratiques pouvaient être exercés en obtenant la citoyenneté canadienne, et l’éducation pouvait servir à solidifier l’avenir de leurs enfants au Canada.

Mes parents avaient parcouru un long chemin afin de bâtir un foyer pour notre famille et, paradoxalement, mes frères et sœurs et moi-même avons tous déménagé afin de poursuivre nos propres perspectives à une époque incertaine. Mon frère Armando (1964) s’est joint au secteur de la sécurité à Toronto. Il s’est marié en 1997, puis est retourné à Montréal pour élever ses fils, Jordan et Julien, aux côtés de son épouse Mellanie Dodds. Ma sœur Nancy (1970) a vécu en Italie et en Espagne en tant que créatrice de mode, puis est revenue à Montréal en 1995. Elle et Harvey Goldstein sont les parents de deux filles, Erin et Samara, et elle est la grand-mère de Molly et Noam. Quant à moi, l’aînée, j’ai déménagé à Ottawa en 1988 afin d’entrer dans la fonction publique fédérale après avoir obtenu un diplôme de l’Université McGill. Je travaille sur les politiques publiques faisant avancer les questions et les valeurs qui représentent l’essence du Canada : la diversité et l’inclusion, la réconciliation avec les Autochtones, la cohésion sociale et les droits de la personne. Je me suis aussi mariée et j’ai élevé deux merveilleux enfants : Alexander, qui danse pour le Ballet national du Canada, et Christina, qui poursuit des études en psychologie et en sport à l’Université d’Ottawa.

Merci, maman et papa, d’avoir fait ce gigantesque acte de foi, face à ce qui ne vous était pas familier, à l’inconnu. Nous avons envers vous une immense dette de gratitude, nous vous devons la réussite de nos vies au Canada. Merci de nous avoir véritablement offert notre propre « bella piccola casetta » au Canada.

Mara Indri (Skinner)

Mariés le jour de leur mariage.
Le jour du mariage de Silvano Indri et de Maria Pia Giacomello, le 5 juillet 1958, Italie
Homme et femme debout devant une vieille voiture.
Le premier appartement de Silvano et de Maria Pia Indri, Montréal, Québec
La mariée est assise sur un canapé entouré de cinq membres de la famille.
Photo de la famille Indri (dont Nonna Albina Giacomello), le jour du mariage de Mara, le 19 août 1995
Homme et femme debout devant une table, la femme tient un bouquet de fleurs.
40e anniversaire de mariage de Silvano et de Maria Pia Indrie, 5 juillet 1998
Des grands-parents avec quatre petits-enfants.
50e anniversaire de mariage de Silvano et de Maria Pia Indrie, 5 juillet 2008 Avec 4 petits-enfants (Christina, Jordan, Julien et Alexi)
Quatre enfants sont assis sur un banc avec huit adultes debout derrière eux.
Photo de la famille, Confirmation d'Alexi, 25 avril 2009, Ottawa, Ontario
Un couple âgé assis derrière une image encadrée d’eux comme un jeune couple.
60e anniversaire de mariage de Silvano et de Maria Pia Indrie, 5 juillet 2018