Bruno Tomaino

Mur d'honneur de Sobey

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Bruno Tomaino

Comme beaucoup d’autres, je n’ai pas pris le temps d’exprimer mes sincères remerciements pour l’accueil à bras ouverts que vous m’avez donné. Je ne m’attends pas à ce que vous vous souveniez de moi, un adolescent de 16 ans, seul, avec des cheveux noirs, des jambes maigres et des yeux marron pleins de larmes. Laissez-moi me présenter.

Je m’appelle Bruno Tomaino. Je suis né le 23 octobre 1936, dans une très petite ville appelée Tomaini. J’ai passé des moments très heureux dans ma ville natale. Mes parents nous ont submergés moi et ma sœur d’amour et d’affection et cela m’est toujours resté. Mon père a immigré au Canada en 1952 et ensuite, le 30 mai 1953, j’ai fait le voyage qui allait changer ma vie. Quand le bateau Conte Biancamano a quitté Naples, mes yeux étaient pleins de larmes. Alors que la côte disparaissait au loin, je pensais que je ne reverrais jamais tous mes amis, mes proches et ma petite ville.

Ma cabine était très bien. Je la partageais avec trois autres hommes plus vieux que moi. La salle à manger était au-delà de ce que j’aurais pu imaginer. Les repas étaient succulents. C’était un festin ! En entrant dans l’océan Atlantique, la plupart des personnes à ma table avaient le mal de mer. Le troisième jour du voyage, alors que j’allais dîner, une dame malade m’a approché et m’a demandé si je pouvais m’occuper de sa fille de neuf ans, de m’occuper d’elle pendant les repas. Alors chaque jour, nous mangions ensemble et nous apportions à manger à sa mère.

Finalement le 8 juin, nous avons vu la terre et je pense que j’étais bien plus heureux que Christophe Colomb quand nous avons amarré. Après avoir récupéré nos bagages, j’ai aidé Sestina et Maria (la mère et la fille) à trouver leur rue. Nous avons vu un tout petit magasin et j’ai acheté une miche de pain et du corned-beef. Je pensais que c’était là de la viande à cause de la tête de taureau qu’il y avait dessus. Nous sommes retournés au port et au moment où on s’apprêtait à ouvrir la boîte de conserve, nous avons réalisé que nous avions perdu la clé universelle pour l’ouvrir. On ne pouvait pas l’ouvrir. À ce moment-là, une dame, qui portait une sorte d’uniforme, est venue, a pris la boîte et est partie dans le bureau. À ce moment-là, j’avais très faim et quand elle a ramené la boîte, j’ai réalisé qu’elle l’avait ouverte pour moi ! Je me souviendrai toujours de son joli sourire. Le pain et la viande étaient empilés haut, comme un accordéon.

Quand le train est parti de la gare, mes yeux étaient rivés vers l’extérieur pendant des heures et des heures. J’ai vu des arbres, des lacs et de petites maisons avec des enfants qui jouaient dehors et qui faisaient signe au train. Deux heures plus tard, j’avais l’exquise sensation que mon voyage serait bientôt fini. Je me souviens quand le train a ralenti. J’ai regardé dehors et nous étions en train de traverser la rivière. Le train s’est arrêté et je ne croyais pas mes yeux le signe à la gare. Il disait: Welland !

J’ai aidé Maria et sa mère Sestina avec leurs bagages. Nous nous sommes séparés dans différents coins de la ville. Pour le reste du mois de juin, je suis allé à l’école. Au début du mois de juillet, j’ai trouvé un travail, à conduire un camion à benne dans une carrière de pierres où mon père travaillait. J’avais 17 ans mais les propriétaires de la carrière me faisaient confiance et je ne conduisais que dans la carrière. Peu de temps plus tard, j’ai commencé à jouer au football dans une équipe de la ville. Grâce à ça, j’ai rencontré beaucoup de monde et en peu de temps, je me suis fait beaucoup d’amis. Mon emploi du temps était de travailler pendant la journée, d’aller là où mon père et moi cuisinions et mangions et ensuite j’allais à des cours du soir pour apprendre l’anglais.

En 1955, j’ai eu l’occasion de changer de travail et d’aller travailler dans une aciérie, « Atlas Specialty Steels ». Dans cette usine, j’ai commencé comme rémouleur mais j’étais très désireux d’apprendre le processus sidérurgique. Comme on m’en a donné l’opportunité, j’ai suivi des cours et mon poste a évolué. J’ai travaillé dans la section de contrôle de fonte et de produits fondus mais j’étais fasciné par l’art de rouler l’acier. Finalement, en 1977, j’ai eu ce que je voulais.

Au fil des ans, j’ai vu Maria grandir et devenir une belle jeune femme. En 1962, pendant la réception d’un mariage, Maria est venue me voir et m’a présenté à une de ses amies qui s’appelait Pasqua. J’étais charmé et ne pouvais quitter cette belle femme des yeux. Nous avons dansé et discuté. Ensuite, je lui ai dit que je voulais l’épouser. Elle a rit et a dit que j’étais probablement marié avec quatre enfants. Le lendemain à l’église, nous avons discuté et je suis allé chez elle. Nous avons commencé à sortir ensemble et un an plus tard, grâce à Maria qui nous a présentés, nous nous sommes mariés. Notre amour a été béni de deux enfants, Angela et Peter. Angela a trois enfants Randan, Asher et Shaneah. Peter est toujours célibataire.

Je suis fier de ma famille et ma famille m’a soutenu dans les moments difficiles comme dans les bons. Je suis très reconnaissant envers cet incroyable pays pour avoir fait de moi un des milliers d’adoptés. J’ai travaillé au Pays-de-Galles, en Angleterre, en France, en Argentine, en Corée du Sud et en Inde mais dès que l’avion atterrit à l’aéroport de Toronto, mon cœur bat la chamade. Je sais que, Dieu soit loué, je suis à la maison.

Merci.

Mes sentiments les plus dévoués,

Bruno Tomaino

Passeport italien avec une photographie du jeune Bruno.
Jeunes gens accoudés sur le pont d’un bateau.