Angela Toneguzzo Bianchini

Angela Bianchini née Toneguzzo

Le 23 juin 1958, ma mère, Angela (Toneguzzo) Bianchini, a embarqué sur le Queen Frederica à Gênes, en Italie, pour rejoindre son mari au Canada. Ne sachant pas quand elle les reverrait, dire au revoir à sa sœur, à son frère et à sa mère était horriblement difficile. Son père était décédé quand elle avait 3 ans, ce qui fait que ma Nonna (grand-mère) était, à elle seule, responsable de pourvoir aux besoins de la famille et d’élever les enfants.

La mauvaise situation économique en Italie et le besoin en briqueteurs au Canada ont incité mon père, Angelo Bianchini, à déménager au Canada en septembre 1954, à la recherche de meilleures opportunités. Le frère de mon père, Rinaldo, qui y avait déménagé deux ans auparavant, a accepté de le parrainer. Une fois qu’il s’était installé et avait trouvé du travail au Canada, mon père est retourné en Italie en décembre 1957 et s’est marié avec son amour de jeunesse, qui venait de sa ville natale, le 15 février 1958. Mon père est retourné au Canada le 11 mars 1958, sans sa femme.

Le Capitaine du navire se faisait du souci pour ma mère : elle était enceinte de quatre mois, de son premier enfant, durant le voyage. Ma mère se souvient d’une soirée de tempête sur le navire. En entrant dans la salle à manger presque vide, elle s’est demandé si elle était en avance pour le repas. Le capitaine l’a informée que la plupart des passagers ne se sentait pas bien et avait donc décidé de sauter le repas. Il lui a conseillé de ne pas se promener seule dans le navire dans son état et l’a invitée à se joindre à lui pour le souper. Ma mère a poliment refusé, expliquant au capitaine qu’elle ne serait pas à l’aise qu’il voie tout ce qu’elle mange. Le capitaine lui a laissé entendre qu’elle mangeait peut-être pour trois et non pour deux.

Le navire a accosté à Halifax, au Quai 21, le 1er juillet 1958. Avant de monter dans le train, ma mère est allée dans une épicerie proche pour acheter à manger. Tout était écrit en anglais, ce qui lui rendait la tâche difficile pour identifier les produits. Ma mère a choisi un pain blanc tranché, une boîte de sardines et un pot de confiture de fraises. Habituée au pain italien avec de la croûte, ma mère n’a pas aimé ce qu’elle avait acheté à manger et a décidé d’aller manger des pâtes au wagon restaurant. Le moins qu’on puisse dire est que les spaghetti au ketchup qu’on lui a servis ne lui ont pas ouvert l’appétit.

Après un voyage de deux jours, via Montréal, ma mère est enfin arrivée à Sudbury, en Ontario, le 3 juillet. Une envie de crème glacée l’a fait aller au magasin le lendemain, acheter du pain, du lait et de la crème glacée « à trois couleurs ». Ma mère avait appris quelques mots d’anglais en lisant les ingrédients d’une boîte de chocolats que son cousin, qui avait été prisonnier de guerre, avait rapportée à la maison

Pendant les deux premières années, mes parents ont habité avec Zio Rinaldo et sa famille. Leur premier enfant, Jack, est né le 16 octobre 1958 ; mon frère a été conçu en Italie mais est né au Canada. Mon père a parrainé sa sœur Adelaide qui a déménagé au Canada en 1959. Finalement, ils ont pu construire leur première maison en 1960. La femme de Zio Rinaldo avait le mal du pays, c’est pourquoi ils sont retournés en Italie en 1964, suivis par la famille de Zia Adelaide en 1970. Du coup, mes parents n’avaient plus de famille immédiate au Canada. Mon père est devenu citoyen canadien en 1963 et ma mère en 1971.

La mère de ma mère, Olga, nous a rendu visite pour la première fois en 1966, puis une deuxième fois en 1974. Le frère de ma mère, Franco, et sa sœur Lidia sont aussi venus nous voir au Canada. La première fois que suis allée en Italie, j’avais trois ans, et j’y suis retournée depuis à plusieurs reprises. Pendant l’été 2005, nous avons fait se réaliser le rêve de ma mère : elle est retournée en voyage en Italie, accompagnée de ses enfants ainsi que de ses petits-enfants.

Cathy (Bianchini) Kulos , avril 2006