En 1952, le gouvernement du premier ministre Louis Saint-Laurent a adopté la première nouvelle loi sur l’immigration depuis 1910. La Loi sur l’immigration de 1952 ne constituait pas un changement majeur par rapport à la législation antérieure mais elle codifiait les pratiques existantes et établissait un cadre législatif qui permettrait au gouvernement d’édicter de nouveaux décrets et règlements.[1]
Le principal effet de la nouvelle loi était de renforcer les pouvoirs du gouverneur en Conseil (soit le cabinet fédéral) et investir le ministre de la citoyenneté et de l’immigration de larges pouvoirs discrétionnaires. Comme dans la législation antérieure, le gouverneur en Conseil était autorisé à adopter des règlements interdisant les immigrants en se fondant sur leur nationalité, l’ethnicité, l’occupation, les coutumes particulières, l’incapacité face au climat canadien et la probable incapacité à assimiler.
La nouvelle loi accordait en outre au ministre de la citoyenneté et de l’immigration un large pouvoir discrétionnaire sur les décisions d’admission et d’expulsion, avec la possibilité d’accorder ou de révoquer des permis d’immigration et de renverser les décisions des agents de l’immigration et de la Commission de l’immigration.[2] Dans les faits, le ministre devenait l’autorité suprême dans tous les cas d’immigration. Afin d’assurer que le pouvoir exécutif du gouvernement conserve la maîtrise de l’immigration, la loi continuait d’empêcher les juges et les tribunaux de réviser, de renverser ou d’interférer autrement dans les procédures d’immigration, sauf si elles étaient liées à un citoyen canadien ou une personne domiciliée au Canada.
La loi élargissait également la pratique procédurale, décrivant les conditions d’arrestation, de détention et de déportation des candidats à l’immigration et le processus d’examen, d’enquête et d’appel.[3] Alors que les classes spécifiques d’immigrants clandestins demeuraient en grande partie identiques à celles des précédents actes législatifs, de nouvelles restrictions ont été introduites pour interdire les homosexuels, les toxicomanes et les trafiquants de drogue d’entrer au pays. Cependant, la loi donnait aux immigrants un recours accru d’en appeler des décisions d’expulsion par la création de commissions d’appel de l’immigration. Les appels étaient interjetés directement auprès du ministre de la citoyenneté et de l’immigration, qui pouvait alors diriger la demande à une Commission d’appel.[4]
Bien que la nouvelle loi visait à simplifier l’administration de la politique d’immigration, elle en a, dans les faits, diminué l’efficacité des procédures. Le pouvoir discrétionnaire illimité accordé au ministre faisait en sorte que ses décisions personnelles soient nécessaires sur de nombreux cas individuels en cours de révision. Le ministre et le personnel du ministère de la citoyenneté et de l’immigration consacraient un temps énorme pour réagir et examiner le nombre extraordinaire de dossiers individuels portés à leur attention, créant un arriérage sur les demandes et limitant le temps qu’ils pouvaient consacrer à d’autres tâches administratives.[5]
Bibliothèque et Archives Canada. Statuts du Canada. Loi concernant l’immigration, 1952. Ottawa : SC 1 Elizabeth II, Chapitre 42
- Ninette Kelley and Michael Trebilcock, The Making of the Mosaic: A History of Canadian Immigration Policy (« La création de la mosaïque : une histoire des politiques canadiennes d’immigration »), (Toronto: University of Toronto Press, 1998), 314, 324.↩
- Freda Hawkins, Canada and Immigration: Public Policy and Public Concern (« Le Canada et l’immigration : la politique publique et l’inquiétude de la population »), 2nd éd. (Montréal and Kingston: McGill-Queen’s University Press, 1988), 102.↩
- Hawkins, 102.↩
- Kelley et Trebilcock, 325-326.↩
- Hawkins, 103.↩