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(Traduit d'anglais)
Mes souvenirs de cette traversée de dix jours sont très mitigés. J’étais très heureuse d’être sur un bateau, mais je voyais tant de gens tristes que j’étais toute mélangée. Je me souviens de gens pleurant fort et agitant des mouchoirs dans les airs. Je regardais par-dessus bord et voyais de gros poissons qui suivaient le navire. Je me rends compte maintenant que c’était des dauphins, mais à l’époque, j’étais convaincue que nous allions nous noyer parce que ces énormes monstres nous attaquaient. Je sais maintenant que les gens pleuraient parce qu’ils étaient en train de quitter le continent européen. C’était les derniers adieux.
Mon premier souvenir du Canada, quand j’avais six ans, est d’être entrée dans un entrepôt gris et laid. Il y avait des gens partout : certains étaient en uniforme et faisaient peur. Ils déballaient des valises, ouvraient au couteau des paquets qui avaient été enveloppés dans un linge et les choses étaient étalées partout sur le sol. Les femmes pleuraient, tout en tenant leurs enfants. Ma mère avait été très malade à bord du navire et a été emmenée plus loin. Il y avait beaucoup de femmes vêtues de robes blanches, parlant une langue que nous ne comprenions pas. Je ne savais pas où elle s’en allait : j’étais confuse et effrayée et je pensais que je serais peut-être la prochaine.
Je me souviens toujours de papa qui disait que le moyen de sortir de la pauvreté était par le biais de l’éducation. Après la Seconde Guerre mondiale, l’Italie était dévastée. Nous sommes venus de Calabre,
« l’orteil » de l’Italie, qui a toujours été en difficulté sur le plan économique. Il travaillait dans les mines de charbon en Belgique, mais le travail y était dangereux et crasseux et il voulait partir. Son père et son frère étaient déjà au Canada, alors ils ont fait la demande pour que papa immigre à « Sault », en Ontario). Le Canada recherchait désespérément des travailleurs et ç’a donc été un processus facile, surtout parce qu’il avait une lettre lui garantissant un emploi. Après avoir travaillé et épargné pendant un an, papa a fait la demande pour faire venir le reste de notre famille au Canada.
Je me souviens que j’étais l’interprète de la famille à chaque fois que quelqu’un devait aller quelque part où ils ne parlaient que l’inglese (l’anglais). Que ce soit pour aller magasiner, chez le médecin ou s’ils avaient besoin d’écrire ou de lire une lettre, j’étais la personne désignée. Mon premier emploi était comme vendeuse dans un magasin de chaussures qui avait une importante clientèle italienne. Je n’ai jamais eu de mal à trouver du travail à la suite de ces expériences. Je me suis finalement retrouvée enseignante au Sault College et j’ai poursuivi mes études pour obtenir un doctorat en éducation des adultes. Je pense que mon père aurait été fier de ce parcours.
Je me souviens qu’on m’ait demandé : « Qu’est-ce que tu aimes le plus, l’Italie ou le Canada ? » Comment quelqu’un peut-il répondre à une telle question ? C’est comme demander qui tu aimes le plus, ta mère ou ton père ? J’aime les deux. Quand je visite l’Italie, je suis très italienne. Quand je suis au Canada, je suis Canadienne et je suis fière d’avoir la double nationalité.
Mes parents ont fait des sacrifices pour venir au Canada et je leur en suis reconnaissante.