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(Traduit d'anglais)
Je suis née à Bremerhaven le 23 janvier 1941, fille de Karoline et Theo Muller, deux parents qui m’adoraient. Tout était en feu, c’était le chaos partout. Bien que je sois née à l’Hôpital catholique Saint-Joseph, j’ai immédiatement reçu le baptême luthérien. Parce que Bremerhaven était continuellement bombardée et que notre survie était en jeu, ma grand-mère nous a invités à vivre avec elle à Malente, dans le Schleswig Holstein. En fait, notre maison de la rue Kaiser a été complètement détruite après notre départ.
Après avoir vécu à Malente pendant 11 ans, nous sommes retournés à Bremerhaven. C’était une ville portuaire. On y trouvait un quai long d’un kilomètre où trois grands navires pouvaient accoster, dont un transport de troupes américain et deux navires d’immigrants. Deux orchestres jouaient sans relâche afin d’atténuer la peur de quitter la mère patrie. Tout ça me fascinait, l’air était toujours rempli de sons, on y criait des noms du pont vers le quai et vice versa, on y pleurait tant de larmes, et tant de draps étaient agités. Tout ça me donnait la chair de poule. À cette époque, j’avais 13 ans et l’idée m’est venue qu’un jour, je me retrouverais de l’autre côté. Je rêvais de quitter l’Allemagne pour aller vivre à Windhoek, dans le sud-ouest de l’Afrique. À l’âge de 18 ans, je me préparais à quitter la maison mais mon père m’a dit que si je partais, je ne pourrais plus revenir. Ça m’a fait peur, alors j’ai terminé mes études et je suis restée jusqu’à 21 ans.
J’avais besoin d’une année pour me découvrir, si je puis dire ainsi, alors je suis déménagée à Berlin Ouest. Avant de quitter Bremerhaven, j’ai rencontré un jeune Canadien, Wilf, qui m’a encouragée à venir au Canada plutôt qu’en Afrique. Wilf me faisait parvenir de longs enregistrements des sons de Montréal. J’étais impressionnée ! Je me suis rendue à l’ambassade du Canada à Berlin Ouest, où le jeune consul m’a accueillie à bras ouverts en disant : « Nous avons besoin de gens comme vous ! » Ce fut assez pour me convaincre de faire une demande d’immigration au Canada.
J’ai réservé une place à bord de l’Arcadia entre Bremerhaven et Montréal. Malheureusement, la plupart des navires qui transportaient des immigrants étaient vétustes, leurs moteurs tombaient parfois en panne et je suis arrivée par une magnifique journée ensoleillée, le 30 avril 1965, à Québec. La vie à Montréal était excitante; l’Expo 67 approchait et j’y suis restée pendant deux ans.
Wilf rêvait de construire un trimaran. Le meilleur endroit pour ce faire, en tenant compte de la météo, était sur l’île de Vancouver. Nous avons trouvé un hameau appelé Mill Bay. Il nous a fallu deux années complètes de travail pour le mettre à flot. Nous voulions le baptiser Thunderbird, mais il y avait déjà beaucoup de Thunderbirds et nous ne voulions pas du nom Thunderbird No 18. Nous nous étions liés d’amitié avec des gens de la réserve indienne de Nootka et ils nous ont donné le nom Nootka de l’oiseau de tonnerre : Tzitzka. J’ai vécu à bord du Tzitzka pendant deux ans au quai des pêcheurs de Victoria, en Colombie-Britannique, tandis que Wilf retournait à Montréal pour gagner de l’argent; notre mariage n’a pas survécu.
De nouveau libre, je suis déménagée à Vancouver, j’ai trouvé un emploi au sein d’une entreprise française de produits de beauté pour laquelle je parcourais cinq provinces; j’ai occupé cet emploi pendant sept ans. Ce travail était épuisant et j’ai décidé de me lancer à mon compte. J’ai ouvert ma propre entreprise et j’y travaille encore après 37 ans. Par l’entremise d’un de mes clients, j’ai rencontré Horst et nous formons un couple heureux depuis 25 ans.