Mur d'honneur de Sobey
Colonne
44
Rangée
16
James and Janet Paton
Mon mari, le Cpl James Reid Paton, est arrivé deux jours avant moi à bord de l'Île-de-France, un navire de transport de troupes. Moi, je suis partie de Liverpool. Pour me rendre au bateau, j'avais pris le train en Écosse, mais un jour après être montée à bord du train, il y a eu une grève du transport ferroviaire. On nous a amenées dans des baraques militaires où nous sommes restées trois jours avant de pouvoir repartir. C'était la pagaille, avec les enfants qui pleuraient et les parents des épouses de guerre qui pleuraient. Partout, c'était le chaos.
Je me suis portée volontaire pour escorter un petit garçon de trois ans appelé Johnie qui allait au Canada pour vivre avec son père, un soldat canadien qui avait combattu en Europe. Sa mère l'avait abandonné. Les infirmières de la Croix-Rouge ont été très serviables durant la traversée. À bord du navire, il y avait 32 soldats qui s'étaient portés volontaires pour aller combattre au Japon. Heureusement pour eux, les Japonais ont capitulé alors que nous étions à deux jours des côtes du Canada. Ces soldats avaient beaucoup de plaisir de leur côté du navire; ils chantaient, jouaient de la guitare et riaient beaucoup. La nourriture à bord était excellente et les menus, un rêve devenu réalité après avoir connu le rationnement pendanr aussi longtemps à cause de la guerre. C'était le premier voyage que le navire faisait depuis avant la guerre. C'était un navire magnifique, extrêmement propre et en excellent état. La traversée s'est faite sans problème et le temps a été superbe.
La première escale a été à St. John's pour permettre à certaines épouses de guerre de débarquer. Puis, nous avons continué vers Halifax où j'allais vivre une autre expérience traumatisante étant donné que je devais me séparer de Johnie et le confier à un officier de l'armée et à une infirmière de la Croix-Rouge. J'espère que Johnie a été heureux avec son père.
À cause du grand nombre de troupes qui revenaient à ce moment-là et qui voyageaient à bord des trains du CPR (Chemin de fer Canadien Pacifique), nous sommes montées à bord d'un train du CN (Canadien National) et nous sommes parties en direction du nord. On ne voyait que des arbres et des lacs. Personne le long de la voie ferrée, seulement des cabanes de pêche sur le bord des lacs. Il n'y avait que des épouses de guerre et des enfants à bord du train. Quand nous arrivions à proximité d'endroits habités, de petites villes ou de villages, les gens du coin venaient voir le train passer et ils nous saluaient de la main. Parfois, le train s'arrêtait et quelques-unes d'entre nous couraient à un magasin pour acheter des fruits ou des friandises. Nous sommes arrivées à Winnipeg le vendredi 18 août. À ce moment-là, nous n'étions plus nombreuses à bord du train. Nous avons été accueillies par des représentantes de la Croix-Rouge. Nous étions seulement deux à nous rendre à Brandon. Malheureusement, j'allais rater la correspondance pour Glen Ewen, en Saskatchewan. Le conducteur a téléphoné à la gare de Brandon et a demandé que le train retarde son départ de deux heures pour que je ne sois pas obligée de rester à Brandon pour attendre le prochain train qui n'était pas avant le lundi. J'ai été impressionnée par la tolérance et la gentillesse des Canadiens à notre égard. J'étais contente de voir mon mari en uniforme à la gare parce que je ne l'avais jamais vu habillé en civil.
Je ne voudrais vivre nulle part ailleurs. J'ai été heureuse au Canada. J'ai élevé quatre enfants qui ont été un atout pour leur communauté. C'est un bon pays et j'ai toujours admiré les Canadiens.
Je suis membre de l'association des épouses de guerre de la Saskatchewan et aussi de celle de l'Alberta. Nous aimons nous réunir. Une amitié inhabituelle et à toute épreuve nous unit.
Je voudrais terminer en disant que les Canadiens qui sont allés outre-mer pour aider à combattre l'ennemi ont sacrifié leur jeunesse et ils ont fait face à des situations qui n'étaient pas normales pour des hommes de leur âge. Il n'y aura jamais plus de groupes d'hommes comme eux. Les épouses de guerre aiment les anciens combattants et c'est un honneur pour elles de vivre dans leur pays et de partager leur mode de vie à la ferme et dans les régions rurales qui leur étaient étrangères.