Stanley Sape Vander Meulen

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Stanley Sape Vander Meulen

Stanley Vander Meulen est né sous le nom de Sape Vander Meulen le 26 janvier 1933 à Driesum, un village de Frise (Friesland), une région des Pays-Bas, sur le bord de la mer du Nord. Sape était le deuxième plus jeune des dix enfants de Jacob et Antje, dont le nom de famille Vander Meulen se traduit par « from the mill » en anglais, ou « du moulin » en français. Le nom est répandu en Hollande en raison des nombreux moulins à vent construits pour le contrôle des inondations dans ce pays dont l’altitude est faible. De tels noms de famille génériques se sont répandus dans le cadre des réformes civiques imposées lorsque la Hollande est tombée sous le contrôle de l’Empire français de Napoléon Bonaparte, au début des années 1800.

Pour les Vander Meulen de Driesum, le nom peut faire référence à une scierie plutôt qu’à un moulin à vent. Le père de Sape, membre d’une lignée vieille de plusieurs siècles de charpentiers accomplis, se spécialisait dans le plan et la construction de maisons, ainsi que dans la confection d’armoires. Jacob donnait de la formation pratique dans ces métiers alors que le jeune Sape suivait son éducation en dessin et en conception dans une école technique située à proximité.

La Deuxième Guerre mondiale de 1939-1945 a épargné le Nord de la Hollande bon nombre des difficultés extrêmes vécues par la plupart des autres Européens. Mais les difficultés de la Frise étaient bien réelles. Une forte tendance à l’émigration prévalait alors, surtout chez les plus jeunes membres des grandes familles telles que les Vander Meulen de Driesum. En 1951, alors que Sape venait d’avoir 18 ans et avait émigré au Canada, la récession économique prolongée d’après-guerre en Europe de l’Ouest constituait un autre facteur de répulsion pour lui, comme pour des millions d’autres qui ont fait partie de la grande vague de migration hors de l’Europe au cours des années 1945-1955.

« Facteurs de répulsion » et « facteurs d’attraction » sont des termes utilisés par les historiens de l’immigration pour expliquer les mouvements à long terme des personnes d’un endroit vers un autre. Après la Deuxième Guerre mondiale, les émigrants néerlandais ont principalement opté pour l’Afrique du Sud, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis et le Canada comme destination. Les « Facteurs d’attraction » de Sape provenaient de Grand Rapids, dans l’état du Michigan, aux États-Unis. Cette ville avait une communauté néerlando-américaine importante et établie de longue date ainsi qu’une industrie du travail du bois reconnue qui produisait des meubles haut de gamme, des poutres de bois stratifié et des pièces d’avions. Plus important encore pour Sape, sa sœur Janet avait récemment immigré à Grand Rapids, avec son mari Dirk Dejager.

Par contre, Sape a choisi d’aller dans la région située à l’ouest de Toronto, en Ontario. Le processus de demande d’immigration du Canada était plus court et moins fastidieux que celui des États-Unis, dont les fonctionnaires s’inquiétaient des connaissances politiques des « personnes nées à l’étranger » durant la période de la « Peur rouge » (Red Scare) et la montée du sénateur anticommuniste Joseph McCarthy. Par ailleurs, Toronto était aussi relativement près du domicile de la sœur de Sape, dans le Michigan. Les autorités canadiennes en place en Hollande, lesquelles ont traité la demande de Sape, recherchaient principalement des immigrants travailleurs agricoles. Sape leur a donné l’impression qu’il avait de l’expérience sur la ferme. Elles ont approuvé sa demande et lui ont accordé un parrainage d’un an sur une petite ferme maraîchère, près du village de Streetsville, dans ce qui est maintenant Mississauga, dans la banlieue de Toronto.

Âgé de 18 ans, Sape s’est rendu de la Frise au port de Hoek van Holland et de là, a pris le traversier vers Douvres, en Angleterre. Il est resté brièvement à Londres, puis à Liverpool où il est monté à bord du SS Franconia le 31 mars 1951. Le navire a fait escale à Belfast et a ensuite traversé l’océan Atlantique Nord pour arriver au Quai 21 d’Halifax le 7 avril. À son arrivée, il a été admis au Canada à titre d’immigrant reçu et a pris le train de passagers du Canadien Pacifique en direction de Toronto pour se retrouver bien vite à Streetsville.

Il a adopté le prénom de Stanley (Stan) en raison de la signification malheureuse que le prénom frison Sape prend pour les anglophones. « Sap » est un mot d’argot anglais dont on affuble quelqu’un qui est facilement trompé en affaires ou aux cartes; ce qui ne s’appliquait guère à Stan. Les habiletés de Stan dans la langue anglaise lui sont venues assez rapidement, en partie parce qu’il était déjà bilingue en néerlandais et en frison, qui sont des langues distinctes aux Pays-Bas et s’apparentent à l’anglais.

Les parrains de Stan, Philip et Ruby Bird, de Streetsville, n’ont pas tardé à se rendre compte que son bagage de compétences dépassait largement les travaux associés à la terre. Ils ont confié leur parrainage à Glenn et Barbara Grice, lesquels dirigeaient une entreprise de construction tout proche et bien vite, Stan s’est mis à construire des maisons et des granges. La formation de Stan l’avait bien préparé aux nouveaux styles et pratiques de construction domiciliaire qui émergeaient en cette période de reconstruction d’après-guerre de l’Europe et devenaient alors la norme dans le boom de l’immobilier nord-américain des années 1950. Les principaux aspects de ces changements venaient du développement de la fabrication en série des panneaux de contreplaqué et de gypse de quatre pieds sur huit. Parmi les compétences de Stan, on lui reconnaissait sa capacité de « faire lever » un projet de construction : l’estimation du coût du projet à partir des plans, la définition du matériel et de l’équipement nécessaires et la main-d’œuvre impliquée. Stan était aussi reconnu pour sa capacité de gérer et de superviser les équipes d’ouvriers.

En 1954, Stan, maintenant âgé de 21 ans, devient entrepreneur indépendant et nomme son entreprise Vander Meulen Construction. La carrière de Stan dans le sud de l’Ontario s’est poursuivie jusqu’au milieu des années 1970. Il faisait la conception et la construction de maisons, d’écoles et d’églises dans la région de Cooksville et Oakville, au sud, jusqu’à Brampton et Orangeville, au nord. Il a aussi construit plusieurs chalets et une clinique vétérinaire le long de la rive est de la baie Georgienne, près de Parry Sound.

Les premières expériences de Stan dans le « nouveau monde » donnent un bon exemple de ce que les historiens de l’immigration définissent comme des « initiateurs » de « chaînes migratoires ». Ces initiateurs sont des individus, des familles ou d’autres groupes de personnes qui offrent des exemples personnels et encouragent les autres à quitter le Vieux Continent pour venir s’établir dans le Nouveau Monde. Dans ces années-là, la « chaîne » fonctionnait principalement par le biais du courrier postal, le bouche-à-oreille et plus rarement par les appels téléphoniques.

En ce qui concerne Stan, aucun des membres de sa famille immédiate ne l’ont suivi. Mais plusieurs autres jeunes hommes de métier des environs de la maison familiale de Stan, dans la Frise, l’ont fait. Celle qui allait devenir son épouse, Alice (Akke) Vander Schaaf, née le 2 avril 1934, accompagnée de sa très grande famille qui comprenait ses parents et 10 frères et sœurs, est arrivée au Canada un an après Stan. Alice et Stan étaient de petits amis dans leur jeune enfance. Sa famille est arrivée au Quai 21 à bord du SS Waterman le 6 juin 1952.

Le parrainage d’immigration de son père est tombé sur la famille Vander Schaaf, de Nestleton en Ontario, au nord d’Oshawa. Après quelques années, la famille s’est installée près de Stan, à Brampton en Ontario. Peter, le père d’Alice né en 1901, ainsi que ses fils les plus vieux et ses gendres ont travaillé avec Stan de façon sporadique au fil des ans. Peter Vander Schaaf était lui aussi un menuisier talentueux qui se spécialisait dans les armoires et les garnitures de finition. Il a eu une longue association avec Stan. Peter est décédé en 1974.

Cette même année, Stan, affligé par le décès subi de son beau-père mais toujours aussi occupé, énergique, et attiré par les régions forestières, a jeté son dévolu sur la côte Ouest du Canada. Son épouse Alice et leurs cinq enfants l’ont bien vite suivi en Colombie-Britannique : Judith, née en 1954, Anne, en 1955, Jacob, en 1957, Ronald, en 1958 et David, en 1963. Jacob, alors âgé de 18 ans et portant le nom du père de Stan, a été le premier à arriver. Les deux travaillaient ensemble à la construction de maisons sur les îles du Golfe, près de Victoria, et à Abbotsford et Matsqui.

À Abbotsford, Stan a établi Fricia Construction, entreprise nommée d’après sa province natale en Hollande. La société faisait la conception et la construction de maisons, de bâtiments agricoles et commerciaux, d’écoles, ainsi que de plusieurs structures d’églises imposantes dans la vallée du Fraser. Des filiales de l’entreprise fabriquaient des portes et fenêtres, importaient du matériel agricole de l’Europe et offraient des services de maçonnerie et de béton.

En 1992, Stan Vander Meulen a pris sa retraite, laissant son entreprise Fricia Construction entre les mains de son fils Ronald, un maçon de métier, et de son gendre Hielke (Harold) Atsma, lui aussi charpentier et immigrant de la région de Frise. Hielke a épousé en 1978 la fille aînée de Stan, Judith. Elle œuvre auprès d’organismes communautaires. Le couple a quatre enfants et plusieurs petits-enfants.

Fricia poursuit ses activités dans des projets de construction spécialisée dans le Lower Mainland (région à l’extrême sud de la province). Des projets comme des églises et des installations publiques, des écoles et terrains de jeux ainsi que certaines des installations pour les Jeux olympiques d’hiver de 2010, à Whistler, en Colombie-Britannique. Un des points forts de Fricia est la mise à niveau sismique des bâtiments publics et écoles pour les aider à résister aux tremblements de terre.

Quatre des petits-fils de Stan, tous champions de la menuiserie, travaillent à Fricia Construction. Son plus jeune fils, David, y participe aussi et fait du bénévolat dans la communauté d’Abbotsford. Sa fille Anne O’Leary est une artiste de renom en Colombie-Britannique et technicienne de bibliothèque à Abbotsford. Le fils aîné de Stan, Jacob, a quitté Fricia en 1976 pour poursuivre des études universitaires et a enseigné à l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse. Alors qu’il était à Halifax, dans les années 1990, Jacob a travaillé dans un studio du Quai 21 en compagnie d’artistes qui y louaient des espaces donnant sur le port d’Halifax. C’était dans le vieux hangar d’immigration avant qu’il ne soit rénové et devienne le nouveau Musée du Quai 21.

Stan et Alice Vander Meulen ont divorcé en 1989, après 36 ans de mariage. Alice (Akke), talentueuse tisserande et artiste du textile, jouit de la compagnie de plusieurs des ses petits-enfants et arrière-petits-enfants en Colombie-Britannique. Après sa retraite, Stan a dessiné et construit presque entièrement par lui-même une grande maison de style traditionnel de vieille ferme néerlandaise. Elle surplombe la première portion du delta du fleuve Fraser à l’extrémité ouest du canyon du Fraser, sur l’île Herrling, entre Chilliwack et Hope.

Stan Vander Meulen s’est remarié en 1995 et aujourd’hui, en 2012, il vit avec son épouse Linda à Hope, en Colombie-Britannique.