Marjorie Franklyne

Mur de Service

Colonne
15

Rangée
22

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Marjorie Franklyne
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War Bride

Marjorie Franklyne était encore une jeune femme quand elle est arrivée avec son premier enfant, qui venait juste d'avoir un an. C'était un nourrisson et elle le portait dans ses bras à sa descente du Queen Mary. On était le 8 août 1946 et elle et son petit Johnnie faisaient leurs premiers pas dans un monde aussi étranger que les accents qui les accueillaient.

Ils arrivaient là où 1,5 million d'autres immigrants entreraient aussi via cette porte d'entrée du Canada. Ce nouveau pays leur ouvrait les bras tandis que le bateau glissait dans les eaux tranquilles du port et trouvait son emplacement le long du quai. Des milliers de jeunes femmes se tenaient sur les ponts, leur enfant dans les bras, les yeux rivés sur espace qui leur semblait vaste, et, peut-être, désolé.

L'esprit de ma mère retourne dans le passé au fur et à mesure que les souvenirs anciens resurgissent dans le présent. « La vie à bord d'un des plus grands paquebots qui ait jamais navigué était à la fois effrayante et très exaltante. Nous avons voyagé pendant cinq jours puis, au milieu de l'Atlantique, nous avons essuyé une violente tempête. Nous ne pouvions pas nous tenir debout et ils ont installés des cordes pour que nous puissions nous accrocher.» Personne ne pouvait rester dans les cabines, ou dans le confort relatif des cabines de luxes, ou même dans les salons. « Nous ne pouvions pas aller dans nos cabines. Je ne sais pas pourquoi, peut-être pensaient-ils que nous allions couler. À un moment, nous pouvions voir la mer, et une minute après, le ciel. La proue du navire montait et descendait, c'était terrible. J'étais malade, Johnnie était malade dans mes bras. Il me vomissait sur un bras, et moi je vomissais sur l'autre. Ça a duré une journée. Il y avait un groupe d’épouses de guerre de Hollande qui n'étaient pas malades et qui sont venues me voir et me demander si je voulais qu'elles me tiennent mon bébé. Je le leur ai donné et cela m'a tracassé. Mais j'étais trop malade pour aller le voir. Finalement, elles me l'ont ramené quand la mer s'est calmée, et bien entendu, il se portait très bien. Il m'est bien arrivé depuis que je suis au Canada de me retrouver sur des bateaux qui secouaient, mais ce n'était rien de comparable à ce qui s'est passé pendant ce voyage. »

Comment était la vie à bord du Queen Mary ? Est-ce que tu t'es fait des amis ? Elle répond : « Non, pas vraiment. Le Queen Mary était équipé pour accueillir des épouses de guerre et des troupes, nous étions dans des couchettes et j'avais un berceau à côté de moi. »

Les souvenirs aussi vivants aujourd'hui que s'ils étaient d'hier, envahissent ses pensées. Ce sont les arbres qui lui ont laissé le souvenir le plus marquant dans sa première impression du Canada. « Que d'arbres » se rappelle-t-elle. « Il y en avait tellement, ... Je pensais que c'était un si grand pays. Bon, c'est vrai, tout le monde pense à cela, en tout cas, au moins ceux qui viennent d'Angleterre. Après être passés par le hangar des services d'immigration, j'ai traversé plein de voies ferrées, ou quelque chose du genre. Je ne pouvais pas croire que ma première impression du pays ne m'était pas très bonne. Je n'aimais pas ce que je voyais. Je me disais: mais qu'est-ce que je fais ici ? J'ai pris le train de Halifax pour Ottawa avec John ; personne n'était là pour me recevoir et j'étais complètement seule, excepté pour mon bébé. »

Je suis arrivée à la vieille gare de Union Station à Ottawa et il y avait tellement de monde là-bas, c'était comme une grande fête, et j'étais si fatiguée parce que je n'avais pas dormi. La traversée de l'océan nous avait pris seulement cinq jours et nous avions rencontré une seule tempête, pas trop pire donc, mais ensuite ce voyage en train m'a semblé prendre ... une éternité. J'étais fatiguée et pas du tout d'humeur à faire la fête. Je ne sais pas ce que ton père et sa famille ont pensé de moi. Tout ce q ue je voulais, c'était dormir. J'ai fait tout mon possible pour faire bonne figure mais je n'en pouvais plus.

Je lui demande comment s'est passé son premier hiver : « Eh bien, je n'ai pas trop senti le froid, mais je ne pouvais pas croire qu'il y avait autant de glace. Il y en avait partout, même sur les trottoirs.» Ma mère ne s'est jamais habituée aux pluies verglaçantes et la glace qui lui empoisonnait la vie chaque hiver. C'est amusant de la regarder en hiver : elle marche comme un pingouin.

Les jours, puis les mois et les années se sont écoulés et elle a rencontré celle que j'appelle tante Jess. Elles se sont rencontrées sur la route de Montréal, à Eastview, dans une clinique pour bébés. «Il y avait une clinique sur la route de Montréal, près de l'église St. Margaret's. C'était une clinique pour bébés où on pouvait aller, faire peser notre bébé et c'est là que je l'ai rencontrée avec sa fille. » Anne Marie, la première fille de tante Jess, et moi, nous sommes devenues des amies pour la vie. À l'époque, nous partagions notre parc à bébé et aujourd'hui les invitations à diner.

Les épouses de guerre sont devenues de grandes amis et en l'espace de quelque années, bien des épouses de guerre et leur famille originaire de Grande-Bretagne allaient former des liens d'amitiés qui résisteraient à l'épreuve du temps. Seule la mort les séparerait.

Portrait d’une jeune Marjorie, avec une inscription dans le coin.
La jeune Marjorie en uniforme.