Szigetvari

Mur d'honneur de Sobey

Colonne
168

Rangée
11

First Line Inscription
Szigetvari
Second line inscription
Janos Ilona Elemer Zsolt

L'expérience de chaque réfugié ressemble aux autres et pourtant chacune est unique.

Quand les Russes ont envahi Budapest, en octobre 1956, des milliers de Hongrois, incroyablement pauvres, se sont échappés du communisme fasciste.

Voici l'humble histoire de la fuite de ma famille qui a pris fin au Canada et de la vie qui a recommencé au Canada.

Au moment de notre fuite, ma famille était composée ainsi : père : Janos Szigetvari 26 ans, mère : Ilona Barath-Szigetvari 25 ans, frère : Elemer 5 ans et moi, Zsolt 5 mois.

Imaginez! S’échapper sans parler la langue, sans argent, sans idée de ce qui s’en vient. Un bambin et un bébé dans les bras avec rien, pas même des couches.

Des histoires ont été racontées au sujet de braves soldats et « des choses qu'ils portaient ». Eh bien, mes parents ont porté mon frère et moi, à travers la frontière de la Hongrie et de l'Autriche, la nuit du Nouvel An, le 31 décembre 1956. Ils n’ont pas eu le luxe de choisir une date symbolique pour une raison sentimentale. Ils ont choisi ce moment précis parce que c’était le moment où les gardes-frontières russes seraient les plus susceptibles d'être en état d'ébriété, de faire la fête.

Cela a fonctionné plus qu’ils auraient pu l’imaginer. Alors qu’ils étaient sur la route vers la ville la plus rapprochée de la frontière autrichienne, mes parents ont été confrontés à des soldats russes. Comme ils n’avaient nulle part où aller, à part cette ville, sauf la frontière (et la liberté), les soldats étaient sur le point de nous arrêter. Ma mère a plaidé que nous étions dans cette petite ville parce que son bébé de 5 mois, moi, était très malade et avait besoin du médecin local. Les soldats étaient bien sûr, méfiants, mais c’est alors que, comme un signal, j’ai vomi sur l'un d'eux. En colère, mais tout de même sympathiques à un enfant, ils nous ont laissé partir!

Mes parents nous ont littéralement portés, mon frère et moi, à travers la toundra gelée et nous avons traversé la frontière autrichienne vers la liberté, tout juste au moment où une horloge de l'église locale a frappé minuit pour sonner la nouvelle année et une liberté nouvellement trouvée.

Le gouvernement autrichien et les agences d'aide ont contribué à organiser un voyage vers Liverpool et le 8 février 1957, nous avons pris le navire Britannic, en route vers Halifax, au Canada. Le navire était luxueux, mais les réfugiés étaient bien sûr humbles et appréciaient de l'entrepont.

Pendant le voyage j’étais violemment malade et l'équipage attendait ma mort imminente. Un de nos compatriotes, réfugié hongrois, était le docteur Nogrady qui m'a opéré et m'a sauvé la vie. (Quarante ans plus tard, je suis arrivé à le rencontrer et le remercier. Il était alors souffrant dans le foyer hongrois de Montréal.)

Le 16 février 1957, nous sommes arrivés avec 510 autres passagers au Canada, au Quai 21 sur le HMV Britannic Cunard 5501 (construit en 1930)!

Je possède toujours les papiers d’immigration d'origine de ma famille décernés ce jour-là.

Sur chaque document le nom de notre famille a été mal orthographié. Et mon deuxième prénom a été écrit par erreur comme mon prénom et même qu’il a été mal orthographié!

Il semble, selon mes documents officiels, que je ne suis pas Zsolt Szigetvari, mais bien Lastlo Stigetvari. Réfugié sans même la bonne identification!

Imaginez la peur et l'inquiétude de mes parents qui, malgré les terribles conséquences possibles, étaient trop terrifiés pour corriger l'orthographe de leurs propres noms sur les seuls documents qui les ont identifiés comme nouveaux Canadiens.

Pourtant, même avec des documents d'immigration mal orthographiés, nous avons été accueillis au Quai 21.

Bien que mes parents soient restés fiers de leurs racines hongroises, nous sommes tous devenus des Canadiens très reconnaissants.

Je suis le dernier membre survivant de notre famille, mais notre mémoire vit maintenant au Canada, au Quai 21.

Merci
Zsolt Szigetvari

Maquette miniature du navire Britannic.
Maquette miniature du navire Britannic à côté d’une carte postale du navire.
Carte postale en couleur du navire Britannic.
Anciennes cartes d’identité canadiennes pour une famille de quatre personnes.