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Une courte histoire de préimmigration - par Brigitta Sbarra (Haider)
Je m’appelle Nicholas. Je suis le mari de Brigitta… et je trouvais que l’une des courtes histoires qu’elle m’a racontées au sujet des événements qui ont précédé son immigration au Canada pourrait être une variation intéressante des récits habituels et quelque peu familiers.
Laissez-moi vous raconter ce qu’elle m’a dit des événements qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale dans son pittoresque village autrichien de Steyr. Il pourrait être pertinent d’abord de résumer certains commentaires sur son immigration tirés de mon livre « Pier 21 - 1951 Our Family’s Immigration To Canada by N.C. Sbarra ».
Brigitta Haider, qui est son nom de jeune fille, est une immigrante autrichienne. Elle est arrivée au Canada en juin 1956, non pas en passant par le Quai 21, mais par des vols indirects de British European Airways, allant de Salzbourg en Autriche, en passant par Londres (Angleterre), puis atterrissant à London, en Ontario au Canada. Elle avait dix-sept ans et voyageait seule, avec très peu d’argent et sans la moindre connaissance de l’anglais.
Pour bon nombre de nouveaux arrivants, la transition du Vieux Monde au Nouveau Monde est généralement motivée par un facteur commun : leur désir de rejoindre leur famille et, bien souvent, le besoin d’un meilleur mode de vie.
Bien qu’il soit reconnu que les ingrédients communs qui auraient mené à une arrivée au Canada par le Quai 21 ne figurent pas dans son histoire personnelle, comme c’est aussi le cas de beaucoup d’arrivants, la vie de Brigitta à la fin de la Deuxième Guerre mondiale contient quelques éléments qui valent d’être racontés.
Par exemple, ses expériences les plus déplaisantes pendant la guerre se résument à l’évacuation de la ville vers la campagne. Ces événements n’étaient pas particulièrement traumatisants en soi, mais les années d’après-guerre ont, pour leur part, engendré une certaine détresse. Pendant nos plusieurs conversations sur cette partie de sa vie, elle a souvent exprimé l’angoisse qui l’habitait à cette époque en raison de sa séparation d’avec ses proches.
« Steyr, ma pittoresque ville natale, est divisée par la rivière Enns, large de quelques centaines de yards. Vers la fin de la guerre, en 1945, l’armée russe avançait sans relâche, explique-t-elle, et l’armée est entrée de force, a occupé toute la ville, et a continué son chemin vers l’ouest. Steyr est brièvement restée sous contrôle russe, puis, peu de temps après, le conflit entre l’armée américaine (les Alliés) et les forces russes a commencé. Éventuellement, les forces alliées ont fini par prendre le dessus et ont repoussé l’armée russe, jusqu’à l’autre côté de la rivière Enns. Voilà donc une situation perturbante, ajoute-t-elle, parce que, dès lors, les armées se faisaient face sur les rives opposées. Cela a séparé les familles, les proches et les amis qui habitaient de chaque côté de la rivière. » Brigitta continue d’ailleurs en expliquant : « Ma famille, c’est-à-dire ma mère, Anna, mon père, Victor, ma sœur, Elizabeth, et moi, habitions dans le secteur occupé par les Russes alors que ma grand-mère (Anna) et d’autres proches habitaient du côté américain, totalement barricadés, et divisés par points de contrôle. Pendant un certain temps, les habitants des deux côtés ne pouvaient pas se déplacer librement. Cela a duré un certain temps.» « La seule vraie méthode de communication entre les familles et amis divisés était de vive voix, c’est-à-dire que les gens criaient à pleins poumons sur le bord de l’eau! Cette époque était bien difficile, » conclut-elle.
L’occupation militaire par les armées étrangères s’est terminée quelques années après la fin de la guerre, et les Russes ont quitté la zone d’occupation quelques années avant les Alliés.
Les familles ont été réunies. Brigitta a pu de nouveau visiter sa grand-mère et ses amis comme bon lui semblait et reprendre ses promenades le long de la rivière. Enfin, elle n’était plus accablée des difficultés entraînées par la guerre et pouvait de nouveau profiter des simples plaisirs de la vie quotidienne.
Son arrivée au Canada le 6 septembre 1956, n’a pas été motivée par des problèmes personnels graves, ni par la recherche d’un nouvel emploi, mais plutôt par son désir de rejoindre sa mère, son nouveau beau-père, Joseph, et sa sœur, qui avaient déjà déménagé vers cette nouvelle terre quelques années plus tôt.
Par cette décision, elle a affecté nos deux vies et a produit une union qui reste forte à ce jour. Nous célébrons déjà notre cinquante-septième anniversaire de mariage.
Et nous voilà en 2017 !
- Nicholas C. Sbarra