Corey Verwolf

Mur d'honneur de Sobey

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Corey Verwolf

VOYAGE VERS UNE NOUVELLE TERRE

On m’a très souvent demandé pourquoi j’avais quitté mon pays pour le Canada. Quand j’avais 9 ans, la guerre a commencé aux Pays-Bas (Hollande) le 10 Mai 1940. Vers 4 h 30 du matin, il y avait beaucoup de détonations, des avions qui volaient partout. Une heure plus tard, j’étais dans le jardin avec mon père et les autres, des parachutistes sautaient des avions. Deux avions ont été abattus avant 8 heures du matin et se sont écrasés dans le champ d’un voisin. Ce n’était pas un beau spectacle. Des petites pierres volaient au-dessus de nous alors que nous étions là. On ne savait pas ce qui se passait.

Ma mère est sortie de la maison en criant : « Qu’est-ce qui se passe ? » Nous avons regardé puis nous avons trouvé qu’un obus d’artillerie avaient touché le mur du sous-sol et étaient tombés directement sans exploser. C’est à ce moment-là que j’ai pensé pour la première fois que ce n’était pas un endroit où vivre pour le reste de ma vie.

Beaucoup de choses se sont passées pendant les six années suivantes. Pendant le premier mois, des voisins se sont fait arrêter et ils ne sont jamais revenus. Des gens étaient tués, des maisons brûlées et il y avait de nombreuses altercations. Chaque année était pire que la précédente. Il y avait régulièrement des rafles plus tard pendant la guerre. Ils recherchaient toujours des gens âgés de 18 à 45 ans pour les envoyer dans des camps de travail en Allemagne. Et aussi de l’or, de l’argent, des œuvres d’art, des peintures, des vélos, des chevaux, de la nourriture et tout ce qui avait de la valeur. Vous pouviez vous faire tuer pour une radio.

Les dix-huit derniers mois de la guerre ont été très difficiles, même à la ferme où nous n’avions plus d’eau, de bois ou de charbon pour chauffer la maison et plus de nourriture. Les citadins étaient désespérés. Nous nous attendions à ce que les alliés nous libèrent à la fin de l’année 1944, mais la grande bataille que les soldats canadiens ont mené en Hollande les a ralentis. Notre ville n’a pas été libérée avant le 10 Mai 1945. QUELLE JOURNÉE !

Les soldats canadiens sont arrivés dans notre ville et nous ont libérés des Allemands (et nous avons par la suite eu de la nourriture). La première tranche de pain blanc a été comme un cadeau du ciel et elle avait un goût de miel. Les gens dansaient et chantaient des chansons et étaient tellement heureux, je me souviens très bien de ce jour. Et même aujourd’hui, les soldats canadiens ont une place à part dans le cœur des Hollandais. Aujourd’hui encore, ils s’occupent des cimetières des soldats canadiens et tiennent des cérémonies en leur souvenir tous les ans.

Pendant les cinq années de guerre, j’ai demandé à mon père si nous pouvions aller au Canada et sa réponse était toujours la même : toute la famille ira là-bas après la guerre.

Eh bien, ce jour n’est jamais arrivé. Je suis d’une grande famille : 4 frères et 5 sœurs et ils avaient tous une bonne situation et gagnaient bien leur vie en Hollande. Mes sœurs viennent régulièrement au Canada, mais mes frères, qui peuvent se permettre financièrement ce voyage, n’aiment pas prendre l’avion.

Je suis allé au Bureau de l’Immigration canadienne quand j’avais 17 ans pour avoir des informations sur ce dont j’avais besoin pour quitter le pays. Il y avait une organisation qui s’appelait « Stitching land verhuizing Nederland ». Ils vous trouvaient du travail au Canada, en Australie, en Nouvelle-Zélande, n’importe où. C’était géré par le gouvernement de Hollande. Et après y avoir pensé, regardé des cartes, je me suis finalement décidé pour le Canada. J’avais d’abord besoin du consentement de mes parents. Il fallait que je sois en bonne santé, que j’ai de l’argent pour le transport, etc. En quelques semaines, mes parents m’ont donné leur accord. Je leur ai dit que le Gouvernement m’appellerait pour l’armée du devoir, et après mon service, je demanderais mon acquittement au Canada. L’Indonésie avait été une colonie de la Hollande et c’était un vrai point chaud (guerre civile). Ils pensaient que c’était mieux de me laisser partir, avant que je sois appelé. Puis j’ai pris mes dispositions pour partir au début de l’année 1950.

(Environ deux ans plus tard, j’ai reçu au Canada mon appel pour le service militaire et devait me présenter à l’armée hollandaise. Mais il y avait aussi une note indiquant que si j’avais un emploi à plein temps, je serais excusé. De plus, si j’entrais en Hollande dans les cinq années à venir, je serais arrêté et envoyé à l’armée.)

13 Février 1950

À environ 7 heures du matin le 13 Février 1950, ma mère m’a appelé pour que je me réveille. « C’est aujourd’hui que tu vas au Canada. Tu es sûr de vouloir y aller ? »

J’étais né dans une ville très petite qui s’appelait « Sion » à environ 4 kilomètres de la ville historique de Delft. Mon père et ma mère sont venus en taxi avec moi jusqu’à Rotterdam, à environ ¾ d’heure de route. Puis j’ai dit au revoir à mes parents. Ça a été très difficile pour ma mère. Je suis allé à l’intérieur pour me faire enregistrer pour mon voyage au Canada. J’étais le plus jeune Hollandais célibataire à émigrer seul (j’avais 18 ans depuis 6 semaines). Puis on est montés dans les bus pour aller à Anvers. Le premier bus a quitté Rotterdam vers 10 h 10 du matin. J’étais dans le troisième bus. Nous avons voyagé jusqu’à la frontière belge et nous l’avons traversée. Puis après environ une heure, nous nous sommes arrêtés dans un restaurant où nous avons tous eu un bon repas. Nous sommes repartis vers une heure de l’après-midi et à deux heures nous étions au port d’Anvers. Le voyage de la frontière jusqu’à Anvers a été très agréable, beaucoup d’arbres et la route était très bonne.

Nous attendions tous avec impatience de voir le bateau qui allait être notre maison pendant les dix prochains jours. Et puis nous l’avons vu notre : c’était un navire qui avait l’air très fatigué qui avait bien besoin d’un coup de peinture. Il n’a plus été utilisé à partir de 1954. Le navire sur lequel j’ai voyagé s’appelait le BEAVERBRAE. C’était un cargo et il pouvait transporter 700 passagers (pas dans des conditions de luxe). Il y avait très peu d’activités sur le bateau pendant le voyage.

Nous avons attendu encore pendant 4 heures avant de pouvoir embarquer. Ma couchette était dans la proue du bateau. Quiconque ayant déjà vécu l’expérience de dormir là quand il y a beaucoup de vent saura de quoi je parle (le bateau va se jeter en avant du plus haut point sur la mer. Puis descendre au point le plus bas). C’était un grand espace avec 30 Hollandais et 40 Allemands qui y vivaient et y dormaient en plus de moi avec ma valise et mes biens personnels. Quand je suis entré dans cet espace, j’ai appris rapidement qu’il ne fallait faire confiance à personne. (C’était chacun pour soi).

Quelqu’un m’a volé mon appareil photo lors du deuxième jour en mer. A 10 heures du soir, quatre remorqueurs ont tiré le bateau de la côte jusqu’au milieu du port, puis nous étions en chemin pour le Canada. A 11 h 30 du soir, nous longions la côte et il était temps pour moi de dormir un peu. J’étais sur la deuxième couchette, celle du dessus était vide. J’ai tenu un journal pendant mon voyage pour émigrer de la Hollande vers le Canada. Je l’ai envoyé à ma mère le 15 Septembre 1953. Peu de temps avant qu’elle meure en 1990, elle me l’a renvoyé parce que je devais garder mes souvenirs tels un trésor. Quelques temps après, je l’ai traduit du hollandais à l’anglais. Après avoir vécu au Canada depuis maintenant plus de cinquante ans, j’avais quelques commentaires à rajouter.

14 février 1950

J’ai dormi jusqu’à 3 h 30 du matin. Quelqu’un m’a appelé pour que je voie Vlissingen (un petit village de pêcheurs sur la côte hollandaise) car on pouvait l’apercevoir. Je suis retourné me coucher après avoir été debout pendant une demi-heure. A 5 heures du matin, je me suis encore réveillé, et au lever du jour je suis monté sur le pont et quelqu’un a dit qu’on voyait la côte de l’Angleterre. On nous a servi notre premier repas à 8 heures du matin mais la nourriture était mauvaise et cela n’a pas changé pendant les jours suivants. Certains d’entre nous se sont plaints au capitaine car les Hollandais avaient payé pour leur voyage au Canada. Il y a eu une bonne amélioration après ça.

15 février

À ce moment-là, nous étions en mer et tout allait bien. J’ai rencontré beaucoup de gens de différents endroits en Hollande. Nous étions à l’intérieur du bateau ou sur le bastingage à regarder la mer.

Une routine s’installait. Mais tout n’allait pas bien. Certains avaient remarqué que le vent se renforçait un peu. Nous avons eu cet après-midi-là une petite tempête et le bateau bougeait comme il bouge habituellement pendant une tempête. Quand le nez du bateau plonge dans les vagues, que l’eau passe par-dessus le bord et que l’hélice à l’arrière sort en partie de l’eau, vous savez qu’il y a un vent fort. Et je ne me sentais pas si bien.

16 février

Je n’ai pas écrit dans mon journal ce jour-là, mais je sais que j’ai eu le mal de mer et que j’ai passé mon temps entre la salle commune (elle était au milieu du bateau) et à la rampe du bateau sur le pont et je me souviens très bien que si quelqu’un m’avait demandé « Vous avez besoin d’aide pour aller au bout de la rampe ? », j’aurais répondu oui.

17 février

Aujourd’hui je suis à nouveau moi-même et je me suis senti bien pendant le reste du voyage. Certaines personnes ont été malades jusqu’à ce qu’elles sortent du bateau à Halifax. Aujourd’hui le vent se renforce. Le bateau a fait un grand détour pour éviter le cœur de la tempête. J’ai eu cette information par des gens qui pouvaient parler anglais au capitaine et aux membres de l’équipage. On nous a dit de ne pas aller sur le pont, les vagues passaient au-dessus de la proue et cela faisait beaucoup de bruit comme des grincements ou des craquements (beaucoup comme un avion qui traverse de mauvaises turbulences) et cela a duré toute la journée et toute la nuit.

18 février

Ce jour-là, la tempête s’est calmée, nous avons pu aller sur le pont et en plus, beaucoup de personnes se sentaient mieux. La nuit dernière j’ai dormi avec mes vêtements parce que la tempête grondait et c’était très inconfortable à l’avant du bateau. Il fallait s’accrocher à sa couchette ou vous pouviez en être expulsé.

19 février

Tout allait bien aujourd’hui. Il n’y a pas eu d’événement particulier. Aujourd’hui, dimanche à 19 heures, il y a eu une messe qui a duré 45 minutes.

Le prêtre l’a appelé la Paroisse de l’Océan. Nous avons aussi reçu 3 paquets de cigarettes de la Croix-Rouge.

20 février

Maintenant il faisait beau donc nous ne pouvions plus nous plaindre. Ce matin, nous avons joué aux cartes jusqu’à midi car il n’y avait pas grand-chose d’autre à faire. J’ai passé le reste de la journée avec une jeune dame que j’avais rencontré cet après-midi-là.

21, 22 février

Il ne s’est pas passé grand-chose pendant ces jours-là, car je n’ai rien écrit.

23 février

Nous avons passé une bonne journée et les gens parlaient de notre nouvelle terre et des endroits où nous allions. Certaines personnes avaient des familles nombreuses (j’espère qu’ils s’en tous bien sortis). À 10 heures le jeudi soir, nous avons pu voir les lumières du Canada (Halifax).

24 février

Le bateau est entré dans le port à 6 heures du matin et a accosté au Quai 21 à 7 heures. Ils ont commencé à faire sortir les passagers, les Allemands ont été les premiers à quitter le bateau. Les Hollandais sont sortis en dernier. Nous sommes tous passés par les Douanes et l’Immigration et c’était agréable de marcher à nouveau sur la terre ferme. Il neigeait et je n’avais aucune chaussure à mettre par temps de neige, donc je suis allé en ville à Halifax pour m’acheter une paire de bottes. Quand j’ai quitté la maison en février 1950, on ne trouvait pas grand-chose encore dans les magasins en Hollande, mais à Halifax les magasins étaient pleins de marchandises et nous étions tous très contents. Il fallait alors que je fasse un choix. Quand j’ai quitté ma maison, je n’ai eu le droit de prendre que 110 dollars hors du pays et les bottes coûtaient 30 dollars. Je pense que le prix avait été augmenté ce jour-là car le bateau venait d’arriver d’Europe. N’étant pas habitué aux grandes quantités de neige, j’ai acheté des bottes en cuir ouvertes sur le dessus mais quand il y avait beaucoup de neige, elle rentrait dans les bottes (j’aurais dû en acheter avec le dessous en caoutchouc et le dessus en cuir avec des lacets pour que la neige n’y rentre pas). Pendant les deux mois suivants, j’ai eu les pieds froids et mouillés car je travaillais dans les bois à couper des arbres avec Herlof Jensen, le fils du fermier de Grand Falls au Nouveau-Brunswick, pour qui j’allais travailler. Tard cet après-midi-là, nous sommes montés dans le train pour notre voyage suivant. Le train allait nous amener vers différents endroits du Canada où nous allions tous. A 6 heures du soir, le train a quitté Halifax, nous avons voyagé toute la nuit et à environ 5h30 du matin, le train a fait son premier arrêt dans un endroit qui s’appelait McAdam au Nouveau-Brunswick.

25 février

C’est à McAdam que je me suis arrêté et que je suis sorti du train. Il avait neigé toute la nuit et il y en avait beaucoup. Je suis entré dans la gare et il y avait un feu dans un foyer. Le chef de gare m’a dit de faire comme chez moi car le train pour Grand Falls ne serait pas là avant 11 h 30 du matin, voire midi.

À Halifax, les gens de l’immigration m’avaient donné une grande carte avec mon nom dessus et l’endroit où je me rendais. Je le portais autour du cou avec une ficelle. Mon niveau en anglais était VRAIMENT très bas. J’avais pris des cours d’anglais pendant l’été avant mon départ, donc j’avais appris quelques mots. Plus tard, j’ai pris des cours d’anglais à Toronto pendant un hiver. J’ai pris beaucoup de cours pendant les années qui ont suivi, la plupart était en lien avec mon travail. Et je me suis impliqué dans beaucoup d’associations au cours des années où j’ai toujours beaucoup participé. Vers 7 h 30, le chef de gare est rentré chez lui pour prendre son petit déjeuner. Il est revenu une heure plus tard avec deux sandwiches pour moi. Je n’oublierai jamais cette grande gentillesse, car j’étais pour lui un parfait étranger. La journée était très longue. J’étais vraiment seul, mais j’ai repensé à la nuit précédente alors que j’étais avec Nel de Boer, la jeune femme que j’avais rencontrée sur le bateau. On avait parlé de nos vies sur la nouvelle terre et de combien de temps j’allais passer dans le train. Et combien de temps elle serait dans le train pour aller en Ontario et comment ce serait. Plus tard ce soir-là, elle est partie retrouver sa famille. Le matin, quand le train s’est arrêté et que j’en suis descendu, elle était à la fenêtre et elle m’a fait un signe de la main pour me dire au revoir. Je lui ai demandé de m’écrire. Je cherchais toujours du courrier de la maison, et aussi de Nel, pour lire et pouvoir comprendre ce que je lisais. On s’est écrit pendant cette année-là, et j’avais besoin de ces lettres ! Je suis allé en Ontario (Toronto) et je lui ai rendu visite à Beamsville, mais avec le temps on s’est éloignés.

Le train est arrivé vers environ midi. Il était en retard à cause de la neige, et il a continué à neiger.

J’étais alors en chemin pour Grand Falls. J’ai trouvé un siège dans le train et je me suis installé. En face de moi, il y avait deux jeunes femmes canadiennes francophones qui parlaient et rigolaient et s’amusaient. Elles m’ont parlé en français et en anglais mais je ne comprenais pas grand-chose. Pendant le voyage j’ai dû aller aux toilettes et j’ai demandé aux jeunes femmes où je pouvais trouver les toilettes. Comme elles étaient des canadiennes francophones, je pensais que je devrais leur demander en français, alors j’ai demandé : « Where is the coiffure ? » mais elles ne savaient pas de quoi je parlais. J’ai essayé « toilettes », W/C, mais là encore je n’arrivais pas à leur faire comprendre. Les filles ont appelé le contrôleur et j’ai dû mimer : « Oh vous voulez dire les toilettes », oui, oui, et il m’a indiqué la bonne direction (on a tous bien rigolé).

Je suis arrivé à Grand Falls vers 17 heures. Je suis entré dans la gare et le contrôleur a vérifié mon nom et mon adresse. Il a appelé Monsieur Niels Jensen sur River Road pour lui dire que son employé était arrivé. Monsieur Jensen a parlé avec son fils et lui a demandé de venir me chercher. Il neigeait toujours et il lui a fallu deux heures pour parcourir les dix milles jusqu’en ville. La gare se trouvait à l’autre bout de la ville, et quand Herlof, le fils, est arrivé, il m’a chaleureusement accueilli et m’a demandé si j’avais faim. À ce moment-là, j’étais affamé, c’était à McAdam que j’avais mangé pour la dernière fois. Herlof m’a conduit en ville dans un restaurant et nous avons eu un bon repas. Puis nous avons pris la route pour faire la dernière partie de mon voyage. Il neigeait toujours énormément et c’était difficile de conduire et de voir la route en même temps. Sur le chemin de la ferme, nous avons été coincés deux fois dans la neige mais avec Herlof nous l’avons enlevé avec des pelles jusqu’à ce que nous puissions repartir. Quand nous sommes finalement arrivés à la ferme (vers 22 heures), j’ai été chaleureusement accueilli par Monsieur et Madame Jensen et on m’a dit de faire comme chez moi.

26 février

Je suis allé me coucher un peu avant minuit, j’étais très fatigué. J’ai dormi pendant toute ma première journée à la ferme. Madame Jensen n’a pas voulu me réveiller pour que je travaille.

Je me suis réveillé le dimanche matin. C’était une journée claire, ensoleillée, il faisait très beau. Quand je suis sorti, les bâtiments et les arbres étaient plein de neige. C’était comme une carte postale. Je savais que j’étais venu au bon endroit.

La première année a été très difficile, des fois je me sentais très seul car je n’avais pas d’amis ou d’endroits où aller pour parler. Les Jensen étaient très bons avec moi et j’aimais beaucoup vivre avec eux. Ils avaient une très grande ferme très variée. Ils cultivaient des pommes de terre, des légumes, et ils avaient aussi des vaches et des porcs

Je m’entendais bien avec Herlof. Il m’aidait avec mon anglais et je m’améliorais petit à petit. Madame Jensen était une très bonne cuisinière et j’étais un jeune homme affamé qui adorait manger (encore aujourd’hui, 53 ans plus tard). Les Jensen vivaient dans un endroit qui s’appelait « Little Denmark » au Nouveau-Brunswick. Grand Falls est une jolie petite ville. Elle a 3 cultures distinctes. En ville, on parlait anglais, dans le nord, danois et dans le nord-est français. Cela pouvait porter à confusion pour un nouvel-arrivant, et c’est peu dire. À la maison on parlait danois mais ils essayaient de m’inclure le plus possible. Monsieur Jensen pouvait aussi parler allemand et cela m’aidait de temps en temps. Mon séjour chez les Jensens s’est terminé à la fin du mois de Novembre 1950, quand le travail annuel a été fini.

Monsieur Jensen a suggéré que Herlof et moi nous allions à Toronto pour trouver un emploi pour l’hiver, donc un jour nous sommes montés dans un train et nous y sommes allés. Nous sommes arrivés très tôt un matin de novembre à la gare Union Station. Je n’étais pas impressionné, à ce moment-là il faisait froid et mauvais. En 2 jours j’ai trouvé un emploi dans une usine qui fabriquait des chaussures (Dack Shoes). Je touchais 0,55 $ de l’heure et mon salaire net était de 21$ par semaine. J’habitais sur la rue Waverley, dans la partie est, avec la famille Nixon. Ma chambre et ma pension me coûtaient 15 $ par semaine. Ce n’était pas en travaillant dans une usine que j’allais gagner ma vie. Au printemps, j’ai trouvé un autre emploi où je gagnais 1 $ de l’heure.

15 ans se sont écoulés avant que je revoie mes parents et c’était la première fois qu’ils rencontraient ma femme et leurs deux petits-enfants canadiens. C’était un grand jour (cela faisait 9 ans que j’étais un citoyen canadien). Mon père a pris sa retraite et a vendu la ferme à mes frères. Ma mère et mon père aimaient le Canada ; ils nous ont rendu visite deux fois plus souvent au cours des années. Ils aimaient tous les deux beaucoup ma femme.

J’ai rencontré ma femme, Pat, à Toronto. Elle était une élève-infirmière à l’Hôpital Général de l’Est de Toronto. Nous nous sommes mariés le 28 Juin 1957 à l’Église Unie de Howard Park à Toronto, après nous être fréquentés pendant 3 ans. Son nom de jeune fille était Hunter. Nous avons déménagé à Weston où Pat était infirmière à l’Hôpital Memorial Humber. Pat est née à Springhill en Nouvelle-Écosse. La ferme de la famille se situait dans un petit village qui s’appelait Leamington, à environ 5 milles de la ville. Plusieurs générations de Hunter sont enterrées là.

J’ai eu une très bonne vie au Canada. Nous avons une charmante famille avec 5 petits-enfants, 2 garçons et 3 filles. Dès le début, j’ai eu beaucoup d’emplois différents. J’avais une bonne mémoire mécanique, donc j’ai commencé à travailler et à étudier pour mon permis de mécanicien automobile. J’ai travaillé pour Imperial Oil pendant quelques années, mais je voulais vraiment travailler à mon compte. Nous avons déménagé à Peterborough pendant l’été 1959 et j’ai créé ma propre entreprise. Je pouvais voir après quelques mois que ça ne marchait pas bien donc j’ai arrêté. Le problème, c’était l’emplacement. Puis il y a eu ce vieil homme en ville, il s’appelait Elwood Cole. Il m’a demandé d’être son associé dans son magasin. Il avait une très bonne entreprise. Quand j’avais travaillé pour Imperial Oil, j’avais appris à m’occuper de la comptabilité. C’était quelque chose en quoi il ne croyait pas et c’était impossible de le faire changer d’avis. Après deux ans, il est devenu évident que nous devions encore prendre de grandes décisions. Avec Pat, nous y avons beaucoup réfléchi pendant longtemps, et c’était mieux que je revende mes intérêts à mon associé. Nous avons eu nos deux fils pendant que nous vivions à Peterborough. Michael était né le 11 Décembre 1959 et notre fils Douglas le 26 Juin 1962.

James Nisbet, un de nos amis, avait entendu dire que j’étais sans emploi et il m’a appelé pour me demander si ça me disait d’aller à Ingersoll. Il venait de louer un Centre de Services sur l’autoroute 401. Avant d’accepter, je lui ai dit que je cherchais une autre affaire et que j’étais d’accord pour travailler avec lui jusqu’à ce que j’aie ma propre entreprise. Deux jours plus tard, j’étais en route pour Ingersoll où se trouvait le Centre de Services. La première règle de l’entreprise était de commander les équipements et d’avoir une annonce publiée dans les journaux locaux. Nous avions besoin de 25 à 30 personnes. Jim allait venir dès qu’il aurait mis fin à son autre entreprise à Toronto. Environ 2 semaines plus tard, un dimanche matin, j’ai ouvert son entreprise, nous avons été occupés dès que j’ai ouvert. Mon ami Jim Nisbet est arrivé vers le milieu de la matinée.

Trois semaines plus tard, vers la fin août 1962, je suis retourné à Peterborough pour aider Pat à emballer nos affaires et déménager à London en Ontario. Notre plus jeune fils avait environ 8 semaines.

J’ai acheté notre maison sur l’avenue Sudbury, un joli petit pavillon dans le quartier Est, et je faisais la navette tous les jours à mon travail à Ingersoll. Pat a vu la maison pour la première fois à son arrivée à London et elle en a été contente. J’ai travaillé pour Jim jusqu’en 1965. Puis j’ai créé ma propre entreprise. C’était avec White Rose, un Centre de Services près de Dutton en Ontario. Maintenant, j’avais besoin d’argent. Nous avons vendu la maison à London et nous avons loué une maison à Lambeth pendant 2 ans et nous faisions la navette vers Dutton.

Mais nous avions besoin de plus d’argent pour faire des affaires et j’ai emprunté le reste de l’argent à mon ami Jim. J’ai fini par louer le Centre de Services à Dutton pendant 10 ans et c’était une très bonne affaire. Jim est venu au Canada en 1957 depuis l’Écosse. Il était mécanicien et il cherchait du travail. Nous avions besoin d’un homme bien à Imperial Oil et je l’ai embauché. Et nous avons été amis pendant toute notre vie.

En 1967, nous avons acheté la ferme à Delaware Twsp et j’ai commencé à travailler à la ferme à plein temps en 1975 quand j’ai quitté le Centre de Services. Nous avons acheté nos premières vaches en 1971 et nous avons acheté petit à petit plus de bétail. Mon plus jeune fils, Doug, a commencé à travailler avec moi à la ferme et nous avons commencé à louer de la terre qui faisait au total 800 hectares. En 1987, nous avons commencé à changer de direction. Nous avons commencé à cultiver des fraises et nous avons aussi créé un verger de pommiers, de pêchers et quelques pruniers. En 1997, nous avons vendu la ferme pour des raisons de santé. C’était ma joie et ma fierté. Nous avons vécu là pendant 30 ans. Nous avons enménagé dans notre appartement sur l’allée Proudfoot à London en Ontario le 15 Mai 1997 pour commencer nos années de retraite.

Pendant toutes ces années, nous sommes restés en contact avec Herlof Jensen. Cet été (2003), sa femme et lui nous ont rendu une gentille visite. Nous avons aussi été voir la famille de Pat en Nouvelle-Écosse. Puis à Halifax au Quai 21 (Site historique national). De 1928 à 1971, le Quai 21 a servi d’entrée pour un million d’immigrants qui cherchaient de nouvelles opportunités au Canada. C’est avec beaucoup d’émotion que je suis entré dans le bâtiment plus de 50 ans plus tard, depuis mon arrivée ici. J’ai eu l’impression d’être à nouveau un jeune homme, sur une terre nouvelle avec de grands espoirs mais aussi de l’inconnu : « Où est-ce que je vais dormir, manger, vivre ? Mais je n’avais pas à m’inquiéter. »

Le Quai 21 a été ouvert au public en 1999 sous forme de musée pour honorer les 495 000 troupes canadiennes qui sont parties pour leur service depuis le Quai 21 pendant la Seconde Guerre mondiale, ainsi que manifester sa gratitude envers les immigrants et leur contribution à ce pays. Et ce pays est très beau. Nous l’avons traversé d’est en ouest.

Cornelis Verwolf, assisté de Patricia Verwolf. Le 14 Janvier 2004.

Vue aérienne de la ferme aux Pays-Bas, avec d’innombrables rangées de cultures.
Une vue aérienne de notre ferme familiale, maison et bâtiments en Hollande. Nous avons cultivé beaucoup de légumes et quelques fruits.
Photo de la maison prise dans la rue.
Mes parents sont en Hollande.
Photo de l’océan prise du pont du navire.
Mes parents sont en Hollande.
Photo de l’océan prise du pont du navire.
C’est un grand océan !
Le jeune Cornelius s’est appuyé contre une rambarde à bord.
Cornelius Verwolf en mer
Cornelius et deux jeunes gens s’appuyant contre une rambarde à bord.
2 jeunes immigrants, et moi
Le jeune Cornelius et le couple plus âgé assis à table sur le porche de la maison.
Ma première année au Canada, été 1950. J’ai vécu avec M. et Mme Jensen et leur fils Herlof à Grand-Sault, au Nouveau-Brunswick.
Maison blanche avec clôture et boîte aux lettres.
Ma première année au Canada, été 1950. J’ai vécu avec M. et Mme Jensen et leur fils Herlof à Grand-Sault, au Nouveau-Brunswick.
Vue de dessous du jeune Cornelius sur l’échelle peinture maison.
Peindre à l’époque je n’avais pas peur des hauteurs
Le jeune Cornelius à genoux, tenant une arme avec 2 corbeaux morts et un lapin au sol.
Herlof et moi aimons chasser pendant notre congé. C’était une mauvaise journée pour ces deux corbeaux et ce lapin.
Femme plus âgée assise sur le canapé avec poinsettia au premier plan.
Noël 2003
Un vieil homme en costume et cravate à côté d’un sapin.
Noël 2003
Un vieux couple assis à table avec des verres à vin devant eux.
Voyage au Portugal
Un couple plus âgé assis à la table du restaurant, avec des assiettes de nourriture devant eux.
Voyage à Halifax en 2003
Collage de stickers Pier 21 et carte postale à l’ancienne.
Collage du Quai 21 visite