Longueur 0:04:49
(Traduit d'anglais)
Mon père est venu d’Iran au Koweït en 1957 pour y créer une entreprise. Je suis donc né et j’ai grandi au Koweït, mais avec un passeport iranien. Ma famille était de religion Baha’ie, une minorité présente tant en Iran qu’au Koweït. Comme Iranien résidant au Koweït, j’ai fréquenté une école iranienne.
À cette époque, il existait une exception spéciale permettant aux Iraniens résidant hors du pays de fréquenter gratuitement l’Université de Téhéran et à leurs proches de demeurer avec eux.
Puis, tout a changé :
Alors que j’étais en onzième année, j’ai vu se dérouler la révolution iranienne à la télé, et peu après, les étudiants ont commencé à manifester dans notre école au Koweït contre le gouvernement iranien. Puis, quelques mois plus tard, le gouvernement islamiste s’est installé et a commencé à exécuter les Baha’is. Ils ont congédié les Baha’is de tous les emplois gouvernementaux, des écoles, des universités, capturant plusieurs d’entre eux pour les emprisonner.
Un jour, après la révolution, le principal de notre école a réuni tous les étudiants et a ordonné aux Baha’is de ne plus se présenter à l’école à partir du lendemain.
À ce moment-là, j’ai senti que je perdais mon identité. Je n’étais plus accepté comme Iranien et, bien que né et ayant grandi au Koweït, je n’étais pas Koweïti.
Je n’avais donc pas d’autre choix que de travailler très dur pour assurer mon avenir au Koweït, ce que j’ai réussi en créant un studio de photographie très professionnel (un studio artistique) où la plupart des chanteurs, acteurs, actrices et artistes venaient se faire photographier. Cela me permettait à moi et ma famille de vivre confortablement, mais nous n’avions pas le droit de posséder une maison ou une entreprise à notre nom.
Au plan émotif, le Koweït était mon pays, même si je n’avais pas la citoyenneté. J’ai même demeuré au Koweït durant la Guerre du Golfe. Par la suite, le gouvernement a parlé d’offrir la citoyenneté koweïtienne aux personnes qui étaient demeurées loyales durant la guerre et à ceux qui se trouvaient au Koweït avant 1965. Nous en avons donc fait la demande, mais quelques mois plus tard, le parlement a voté pour que la citoyenneté ne soit offerte qu’aux Arabes et aux musulmans. J’étais encore une fois déçu de l’absence des droits de la personne.
Ma femme et moi avons commencé à nous inquiéter pour nos deux garçons. J’ai commencé à penser à leur avenir. Où iraient-ils pour leurs études universitaires ? Comment pourraient-ils trouver un emploi avec un passeport iranien ? Où pourraient-ils avoir une maison à leur nom ? Enfin, ce qui n’était pas la moindre des choses, où pourraient-ils se sentir chez-eux en étant fiers de leur pays et bien enracinés ?
Nous avons appris par des amis que le gouvernement canadien avait différents programmes pour les immigrants. Il nous a fallu quatre ans pour nous rendre jusqu’à l’entrevue. Une fois acceptés, nous avons vendu le studio, ce qui a rendu les employés très tristes, car, après toutes ces années, nous étions devenus comme une famille.
Je ne peux dire à quel point j’étais heureux, quand le préposé à l’aéroport de Toronto après avoir examiné nos documents, a tamponné nos passeports en nous disant : « Bienvenue chez-vous », nous délivrant du stress que nous avions connu avant d’arriver. J’ai senti que j’avais maintenant un pays.
Mon fils aîné vient de terminer ses études collégiales et il ira deux ans à l’UÎPÉ, puis à l’Université de Dalhousie en génie mécanique. Le plus jeune est en onzième année et il rêve de devenir chef cuisinier, et nous avons découvert que l’école culinaire du Holland College est l’une des meilleures au Canada.
Nous sommes maintenant heureux ici et nous avons à notre nom notre maison et notre entreprise, les gens sont gentils et généreux, notre entreprise progresse peu à peu, nous apprenons à connaître la culture et les intérêts des gens afin de développer notre entreprise à l’avenir.
J’ai maintenant une identité et un pays dont je peux être fier.