Herman et Grada Blom

Mur d'honneur de Sobey

Colonne
9

Rangée
7

First Line Inscription
Herman and Grada Blom
Second line inscription
and Family

Notre famille a quitté Rotterdam à bord du Groote Beer le huit avril 1953, avec 100 dollars en poche. Mes parents, Herman et Grada, et leurs six enfants, Grace, Ida, Harmen, Albert (moi-même), Gerard, et Wouter (Walter), dont les âges s'échelonnaient de l'adolescence à la petite enfance, ont fait le voyage.

Mes parents ont décidé de quitter leur domicile d'Apeldoorn pour donner à leur jeune famille de nouveaux débouchés au Canada. À cause de l'intensification de la guerre froide, l'ambiance en Europe était à l'insécurité. La Seconde Guerre mondiale avait déjà été une épreuve. Sous l'occupation nazie, mon père, Herman, s'était engagé dans des activités de résistance, un risque qui a été enfin récompensé par la Croix de la résistance (Netherland's Resistance Cross) en 1982.

La traversée de l'Atlantique a duré huit jours sur une mer agitée, caractéristique au printemps. À l'exception de Harmen, toute la famille a été plus ou moins affectée par le mal de mer. À la différence d'autres familles, nous avons eu la chance de faire le voyage ensemble, mes parents s'étant assurés à l'avance d'avoir une cabine à bord. Il me reste du voyage, entre autres souvenirs, l'image de mon père essayant tant bien que mal d'écrire des lettres qui devaient être envoyées en Hollande à notre arrivée au Canada, alors que le tangage et le roulis du navire envoyaient le mobilier se promener d'un côté à l'autre de la pièce !

Au bout de huit jours nous sommes arrivés à Halifax. Toutefois nous n'allions pas pouvoir continuer notre voyage comme prévu. Un fonctionnaire ayant à tort soupçonné que la fièvre du plus jeune était symptôme d'une maladie contagieuse, nous avons tous été mis en quarantaine. C'était effrayant pour les enfants. Il y avait des barreaux aux fenêtres et pas de poignée du côté intérieur des portes de nos chambres. Nous étions enfermés chaque soir à huit heures, heure du coucher. Depuis notre fenêtre, nous avions vue sur le port et sur notre bateau. En voyant le Groote Beer s'éloigner du quai, ma mère s'est mise à pleurer. Elle n'avait pas choisi de venir au Canada pour se faire « mettre en prison »

Cinq jours plus tard, nous avons pu reprendre notre voyage vers l'Ouest. À cause de la quarantaine, nous avions manqué le train habituel des immigrants. Le train que nous avons pris suivait avec lenteur un long trajet et s'arrêtait fréquemment. À bord, nous dormions sur des bancs de bois durs avec des oreillers de location. Pour manger, il y avait des sandwichs, alors à l'arrêt à Québec, mon père est descendu pour essayer d'acheter autre chose. Le moment du départ approchait et Papa n'était pas encore revenu, ce qui nous causait une grande inquiétude ; il avait tout notre argent et nos papiers. Juste au moment où le train allait démarrer, il est revenu. Le dictionnaire hollandais-anglais ne lui avait pas été d'un grand secours dans ses recherches !

Le voyage en train a duré cinq jours, nous faisant traverser de nombreuses petites communautés du nord de l'Ontario. L'aspect sauvage du paysage le rendait inhospitalier à des yeux habitués à la campagne bien apprivoisée de la Hollande. À Kapuskasing, le contremaître d'un camp de bûcherons a offert du travail à Papa, mais ayant à l'esprit le travail que son parrain lui avait trouvé, Papa nous a fait continuer vers l'Ouest. Finalement nous sommes arrivés à destination : Saskatoon.

La famille a bientôt essuyé quelques difficultés dans sa nouvelle patrie. Le lendemain de notre arrivée, une tempête de neige de printemps pour laquelle nous n'étions pas préparés a pris la ville d'assaut. L'Armée du Salut nous est venue en aide en nous fournissant des vêtements adaptés. L'emploi de Papa était tombé à l'eau, mais il en a rapidement trouvé un autre chez Weststeel.

Les quelques premiers mois, nous avons vécu dans la cave rudimentaire de la maison d'une autre famille. Puis le 4 août 1953 nous avons acheté un terrain à bâtir. Papa a emprunté un bulldozer (à son deuxième emploi qu'il avait trouvé entretemps) pour creuser la fondation. Avant l'automne, nous avons déménagé dans la première de nos maisons canadiennes : une cave avec un toit plat.

Au Canada, notre famille a prospéré et s'est élargie. En 1956, la plupart d'entre nous a déménagé à Guelph, en Ontario, et est restée dans cette région. Au cours des dernières années, nos deux parents sont décédés, mais pas avant d'avoir vu arriver quatorze petits-enfants. Comme l'avaient fait leurs parents, ceux de cette nouvelle génération ont tiré du Canada le meilleur parti possible, allant au collège et à l'université et se lançant dans divers métiers et professions. Quelques membres de la deuxième génération ont maintenant des familles, ajoutant neuf arrière petits-enfants à l'effectif. Nous sommes tous fiers d'être canadiens et pensons que Maman a eu une bonne idée en suggérant ce pays quand la famille cherchait un nouveau foyer.