Entretien avec Linda Granfield qui, il y a 49 ans, est arrivée au Canada avec deux casseroles, deux serviettes et quelques livres. Elle a ensuite écrit de nombreux ouvrages sur l’histoire de ce pays, inlcluant un livre sur le Quai 21, ainsi qu’un livre sur les épouses de guerre britanniques qui sont arrivées ici.
Vous avez quitté les États-Unis pour immigrer au Canada. Que pouvez-vous nous dire à propos de votre expérience?
Je suis venue pour faire mon doctorat à l’université de Toronto. À l’époque, il fallait payer 30 $ pour déposer une demande d’inscription à l’université. J’étais adjointe pédagogique à Boston et je n’avais que 30 $ pour les candidatures.
Lorsque j’ai annoncé à mes parents que j’étais acceptée, ma mère m’a dit : « Oh, tu ramènes la famille au Canada. » Alors j’ai demandé : « Que veux-tu dire? » Et elle m’a dit : « Ta grand-mère était originaire du Nouveau-Brunswick. »
Je ne connaissais personne ici. J’avais deux pots orange (la couleur orange était en vente), deux serviettes orange et quelques livres. Et je me suis ramassée au Canada. Je vivais dans une chambre louée avec une salle de bain partagée.
J’ai rencontré mon mari canadien dans l’un de mes cours. J’ai remboursé mon prêt d’études, je me suis mariée et je suis venue vivre ici de façon permanente.
Qu’avez-vous découvert sur vos ancêtres canadiens?
J’ai commencé à construire un arbre généalogique sur Ancestry. Mon mari a toujours plaisanté sur le fait que son peuple était arrivé au Canada avant le mien, c’est-à-dire dans les années 1830, en provenance d’Irlande. Et puis j’ai découvert que l’arrivée des miens remontait à 1790! Duncan Shaw est venu d’Écosse à Sackville et s’est ensuite installé à Hillsborough, au Nouveau-Brunswick.
William Henry Steeves, père de la Confédération, est mon cousin germain au quatrième degré. J’ai été étonnée de découvrir que j’étais liée à l’histoire du Canada.
J’ai aussi une grand-mère qui a épousé un soldat canadien de la Première Guerre mondiale en Angleterre. Il a été tué en France en août 1918. Elle a reçu l’allocation de veuve et est venue au Nouveau-Brunswick pour vivre avec sa famille. Elle a ensuite épousé mon grand-père.
Ces parents originaires du Nouveau-Brunswick ont émigré en Nouvelle-Angleterre dans les années 1920 pour travailler dans des usines.
Avez-vous retrouvé leur trace au Nouveau-Brunswick?
En 2017, j’ai visité Petitcodiac et Hillsborough. J’y ai vu la tombe de Duncan. La rue où se trouvait la ferme familiale, Shaw Road, a été reprise par la nature. C’est la vie. Les propriétés familiales ont été établies, mais les ancêtres meurent ou partent et la nature reprend peu à peu le dessus.
Comment avez-vous commencé à écrire des livres?
Je travaillais dans une librairie pour enfants de Toronto et je faisais des critiques de livres pour enfants. J’écrivais sur les auteurs et j’en apprenais plus sur l’histoire du Canada.
L’un des éditeurs a demandé : « Quand cesserez-vous d’écrire au sujet des livres pour enfants pour en écrire un vous-même? » C’était une invitation à ne pas refuser. Mon premier livre, sur les chutes du Niagara, est sorti en 1988.
Puis vous avez commencé à écrire sur l’histoire de la guerre au Canada.
Ça a commencé à cause de In Flanders Fields Je me suis dit... Je ne connais même pas le nom de l’auteur. Les enfants le savent-ils? C’est ce qui m’a amené à faire des recherches sur la Première Guerre mondiale et à écrire un livre sur le poème.
Je suis toujours étonnée lorsque les gens disent qu’ils n’aiment pas l’Histoire. C’est une histoire, après tout. Plus j’en apprends sur les histoires du Canada, plus je me sens liée à ce pays.
C’est comment, être américano-canadienne?
C’est parfois difficile. J’ai été attaquée verbalement parce que je venais des États-Unis. Certaines des soi-disant blagues des médias canadiens sur les Américains sont offensantes; remplacez « Américain » par n’importe quelle autre nationalité et je doute que ce matériel soit permis ou toléré.
D’année en année, je me sens plus canadienne dans ma façon de voir les choses. Les gens demandent : « Qui encouragez-vous aux Jeux olympiques? » C’est toujours le Canada. Je n’ai pas trouvé de Canadiens nés aux États-Unis qui utilisent le terme « américano-canadien ». Nous sommes un groupe culturel qui ne se célèbre pas comme le font les Canadiens d’origine asiatique, les Canadiens d’origine ukrainienne ou d’autres groupes patrimoniaux ou immigrants. J’espère que cela changera.
Pouvez-vous m’expliquer comment vous êtes entrée en contact avec le Quai 21?
J’ai vu les articles de presse sur l’ouverture du Quai 21. J’ai visité le Musée pour la première fois pendant quatre jours en septembre 1999. J’ai commencé à consulter les documents du centre de ressources; Carrie-Ann Smith m’a beaucoup aidée. Le livre sur le Quai 21 a été publié en 2000.
Comme j’avais omis beaucoup d’information sur les épouses de guerre dans ce livre, j’ai interviewé d’autres femmes pour un autre livre, Brass Buttons and Silver Horseshoes, publié en 2002.
Le mois d’août marque votre 49e anniversaire au Canada. Qu’est-ce que cela signifie pour vous, être canadienne?
J’ai appris que le Canada est mon passé ancestral, mais aussi ma « nouvelle » histoire. C’est là que j’ai élevé ma famille. En 30 ans de carrière, j’ai partagé l’histoire du Canada avec près de 2 millions de jeunes lecteurs, en visitant des écoles dans tout le pays. Les nouveaux citoyens canadiens lisent mes livres pour en apprendre davantage sur le pays, ce qui est d’autant plus agréable que je suis moi aussi une immigrante devenue citoyenne.
Yes, as my mother said, I’ve brought the family back to Canada and it’s where I choose to be. Oui, comme l’a dit ma mère, j’ai ramené la famille au Canada. C’est là que j’ai choisi d’être.
Le livre de Linda Granfield, Pier 21: Gateway of Hope peut être acheté à la boutique du Musée. Sa note biographique est disponible ici.