Devenir un(e) réfugié(e)
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(Cette vidéo n'est disponible qu'en anglais; la transcription a été traduite de l'anglais.)
Mooshie Zahirovich (MZ) : Donc, la Yougoslavie s'effondrait et quelques parties s'étaient déjà déclarées comme étant des États indépendants et je pouvais entendre des coups de feu de plus en plus près de chez moi. On pouvait sentir un malaise tout autour de nous. Les hommes s’armaient déjà et envoyaient dans la mesure du possible les, euh, leurs enfants et leurs épouses, ainsi que les personnes âgées, à l'extérieur du pays.
C'est ce que j'ai fait avec mon épouse, qui était enceinte. Et je devais rester, car j'avais un emploi et il y avait encore cet espoir—que ça n'arrivera pas. Je—c'est difficile à expliquer, parce que c'est—c'est en nous, nous espérons toujours le meilleur. Nous devenons inconscients de ce qui arrive autour de nous, de ce que tout le monde peut voir, mais pas nous.
Et moi, parce que j'étais dans une —ma situation conjugale était différente. Je ne pouvais pas participer aux activités des hommes de la région et je n'ai pas participé aux préparatifs de guerre.
La pression était immense. Je ne savais pas quoi faire de moi-même et finalement, un jour, je me suis dit, bon, je vais m'impliquer dans la garde du village. Alors une nuit, de minuit jusqu'au matin, je suis allé avec un fusil, avec d'autres hommes, et nous avons attendu voir si quelque chose arriverait. Puis, j'ai décidé que non, vous savez quoi? Ce n'est pas pour moi. Je n'ai pas ma place ici. Parce que c'était le cas.
Et ça s'est d'ailleurs avéré. Habituellement, dans une guerre, il y a deux parties qui s'affrontent. En Bosnie, il y avait trois parties qui s'affrontaient. C'est donc, c'est presque le double, tout est amplifié. Et euh, mon groupe ethnique combattait le sien et—
Yella Zahirovich (YZ) : En gros, mon frère combattait son frère. Parce que—
MZ : Ouais. Ça, ça—
YZ : Ils étaient tous les deux soldats.
MZ : Pas directement, mais sur différents fronts, mais c’est, c'était ça.
Ensuite j'ai, le matin suivant, je suis monté en voiture avec l'un de mes collègues et je me souviens d’avoir quitté mon village et d’avoir conduit entre les bombes qui étaient installées sur la route pour protéger le village des, euh, des chars d'assaut. Et je partais et déjà mon village—rien ne se passait. La division était totale—il n'y avait pas de police, il n'y avait pas de gouvernement, rien, rien, rien. Nous pouvions sentir la guerre dans l'air.
Et je suis parti—j’ai réussi à quitter, mais en fait, j'avais encore espoir que je reviendrais.
YZ : Ouais.
MZ : C'est—c'est encore incroyable, mais c'est la raison pour laquelle je n'ai même pas emporté mon passeport avec moi. Mais bien sûr que je vais revenir. Je ne suis jamais revenu. Je suis au Canada.
Histoire orale 14.03.06YMZ avec Yella et Mooshie Zahirovich
Musée canadien de l'immigration du Quai 21