Les lois canadiennes sur l’immigration

Résumé

Le Canada réglemente l’immigration depuis 1869, et les lois ont été façonnées par le climat social, politique et économique, ainsi que par la race, la désirabilité et l’intégration. Les éléments de discrimination ont souvent occupé une place importante dans la politique d’immigration canadienne. En 1967, la politique d’immigration a été libéralisée avec l’introduction du « système de points ». La diversité culturelle des immigrants canadiens au Canada est désormais un élément clé de l’identité canadienne. La législation sur l’immigration reflète l’évolution des croyances du Canada et son histoire d’inclusion et d’exclusion.

par Lindsay Van Dyk, Ancienne Chercheuse junior

Que nous disent les règles de l’immigration sur le Canada ?

Depuis 1869, le Canada a des lois et règlements régissant l’entrée des immigrants. La législation sur l’immigration a évolué et changé au fil du temps, influencée par la transformation sociale, le climat politique et économique, ainsi que les tendances dominantes sur la race, l’opportunité et l’intégration. L’approche « portes ouvertes » de la fin du XIXe siècle a progressivement fait place à des mesures plus restrictives qui étaient discriminatoires en regard de la race, de l’origine ethnique et de l’origine nationale. La discrimination ouverte a continué de faire partie de la politique d’immigration canadienne jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle, quand les compétences et l’éducation sont devenues les principaux facteurs d’entrée au Canada, sans pour autant éliminer tous les éléments de discrimination. Depuis l’adoption, en 1971, du multiculturalisme comme politique officielle du Canada, la diversité culturelle des immigrants au Canada a été élevée au rang d’élément clé de l’identité canadienne. En définitif, la législation sur l’immigration est un reflet des croyances et des attitudes de la société, dévoilant l’histoire d’inclusion et d’exclusion du Canada.


Histoire de l'immigration

L’Acte d’Immigration, 1869

La première politique canadienne d’immigration postérieure à la Confédération comportait peu de restrictions à l’immigration. L’Acte d’Immigration de 1869 insistait sur la nécessité d’assurer la sécurité des immigrants lors de leur passage au Canada et de les protéger contre l’exploitation à leur arrivée. Le gouvernement du premier ministre Sir John A. Macdonald avait élaboré une politique d’immigration ouverte encourageant le peuplement de l’Ouest, cependant l’immigration de masse tardait à se matérialiser parce que tout au long de la fin du XIXe siècle, le taux d’émigration surpassait le taux d’immigration.

Commission Royale sur l’Immigration Chinoise, 1885

La Commission Royale sur l’immigration chinoise fut créée pour démontrer la nécessité de contrôler l’immigration chinoise au Canada. Un grand nombre de travailleurs chinois sont venus au Canada dans les années 1880 pour travailler au segment de l’ouest du Chemin de fer Canadien Pacifique. Plusieurs politiciens, syndicalistes et résidents de race blanche de Colombie-Britannique protestaient, disant que les chinois étaient immoraux, sujets aux maladies et inassimilables. La commission recommanda d’imposer à chaque chinois désireux d’immigrer au Canada un droit de 10 dollars.

Acte de l’immigration chinoise, 1885

L’Acte de l’immigration chinoise de 1885 fut la première pièce de législation canadienne excluant certains immigrants sur la base de leur origine ethnique. Elle imposait à toute personne d’origine chinoise désireuse d’entrer au Canada un droit de 50 dollars. L’imposition de ce droit d’entrée ne réduisit que temporairement le nombre d’immigrants chinois arrivant au Canada. En 1900, le droit augmenta à 100 dollars par personne, puis à 500 dollars en 1903.

Commission royale sur l’immigration italienne, 1904-1905

La Commission royale sur l’immigration italienne fut créée en 1904 afin d’enquêter sur l’exploitation des journaliers italiens par des courtiers en emploi connus sous le nom de padroni. Les padroni recrutaient des journaliers italiens pour des entreprises canadiennes et prenaient en charge leur transport et leur emploi à leur arrivée au Canada. La corruption régnait dans ce système car plusieurs padroni gonflaient les prix pour leur intermédiation, le transport et l’alimentation. La commission concentra ses investigations sur le puissant padrone montréalais Antonio Cordasco qui recrutait principalement des travailleurs pour les Chemins de fer Canadien Pacifique.

Acte de l’immigration, 1906

L’Acte de l’immigration de 1906 introduisait une politique d’immigration plus restrictive. Elle élargissait les catégories d’immigrants refusés, formalisait un processus de déportation et attribuait au gouvernement des pouvoirs de jugement accrus lors de l’admission. Même si la loi ne restreignait pas les immigrants sur la base de leur culture, de leur appartenance ethnique ou de leur nationalité, le gouvernement pouvait rejeter n’importe quelle classe d’immigrants lorsque cela semblait nécessaire ou opportun.

Entente à l’amiable, 1908

En 1908, le ministre canadien du Travail, Rodolphe Lemieux négocia un accord avec le ministre japonais des Affaires étrangères, Tadasu Hayashi en vue de limiter l’immigration japonaise au Canada. Les restrictions à l’immigration japonaise ont été jugées nécessaires à la suite d’un mouvement de travailleurs japonais en Colombie-Britannique et d’une montée du sentiment anti-asiatique dans la province. Selon les termes de l’«Entente à l’amiable », le gouvernement japonais limitait volontairement à 400 par année le nombre d’immigrants japonais au Canada.

Règlement sur le voyage continu, 1908

Le Règlement sur le voyage continu obligeait les immigrants éventuels à voyager d’une seule traite vers le Canada depuis leur pays natal ou celui dont ils étaient citoyens avec un billet acheté dans ce pays. Comme il n’existait pas de liens maritimes directs entre l’Inde et le Canada à cette époque, le règlement empêchait effectivement l’immigration indienne. Cela entraîna aussi un déclin de l’immigration japonaise au Canada en fermant leur première route migratoire passant pas Hawaii.

L’Acte d’Immigration, 1910

L’Acte d’immigration de 1910 étendit la liste des immigrants indésirables et donna au gouvernement un plus grand pouvoir discrétionnaire à propos de l’admissibilité et de la déportation des immigrants. Les immigrants jugés « inadaptés au climat ou aux exigences du Canada » étaient interdits, tout comme ceux qui étaient parrainés par des organismes de charité. Le pouvoir décisionnel demeurait concentré dans les mains du pouvoir exécutif du gouvernement; les tribunaux et les juges ne pouvaient réviser, renverser ni interférer de quelque manière que ce soit dans les décisions du ministre responsable de l’immigration et les travaux du conseil d’examen.

Décret-du-Conseil CP 1911-1324

Au début du XXe siècle, les officiers d'immigration canadiens poursuivaient une campagne concertée visant à bloquer l'établissement des Noirs au Canada. Les autorités canadiennes ont affirmé que leurs politiques ne comportaient pas de barrière de couleur, mais elles ont créé de nombreux obstacles pour les immigrants noirs. Cette pratique discriminatoire était alimentée par un racisme domestique omniprésent et elle avait atteint sa pleine expression en 1910 - 1911. En réponse à des fermiers noirs persécutés qui tentaient de quitter les États-Unis dans l'espoir d'une vie plus juste au Canada, le gouvernement du premier ministre Sir Wilfrid Laurier avait utilisé le prétexte de leur supposée inadaptation climatique pour passer un décret en conseil interdisant toute immigration « nègre ».